Dans les méandres du discours public, une figure se détache avec force et controverse : Alain Soral. Alors, homme de lettres ou provocateur invétéré ? Ce qui est certain, c'est qu'il laisse peu de place à l'indifférence !
C'est en sa compagnie que nous décortiquons le phénomène Soral, un nom qui résonne avec force dans le paysage intellectuel et médiatique français.
Alors que dans Comprendre l'Empire, Alain Soral partait de la Révolution française, de la succession Ancien Régime/République, de l'opposition Religion et Raison, y démontrant notamment tout ce que ce régime théocratique avait de raisonnable sur le plan pratique et tout ce que cette raison politique avait de fanatique et de déraisonnable dans les actes et les faits, s'y déployait aussi une logique, une logique politique de pouvoir et de domination. Mais de domination au nom de quoi ?
Cette nouvelle domination des uns sur les autres, de la démocratie républicaine sur la monarchie théocratique, puis même de la république démocratique sur la démocratie républicaine s'est faite au nom d'un nom magique, d'une idée parfaitement séductrice : l'égalité !
L'épopée moderniste, la grande idée, le concept au coeur de la dynamique du cycle c'est ça : le pouvoir au nom de l'égalité. Et une égalité de plus en plus totale, soit, en bonne logique, de plus en plus formelle et abstraite, ce qui se traduit le plus souvent dans la pratique en absurdité, voire en son contraire. Le voilà le coup de génie qui embrasse toute l'époque, la suprême arnaque comme sortie de la tête même du diable : l'inégalité au nom de l'égalité !
Alain Soral nous fait cheminer de la Tradition à Marx, de la logique formelle à la complexité du réel, de la parole du Christ à la loi du nombre et du Marché, jusqu'à ce futur qui se déploie sous nos yeux, entre surveillance de masse, censure et dictature à venir du grand reset...
Quelles relations lient intrinsèquement l'État moderne et le capitalisme ? En quoi peut-on dire que tout mouvement émancipateur conséquent ne saurait écarter de ses objectifs une dissolution de l'État ? Sans renoncer à une argumentation systématique, c'est sous la forme de thèses que Robert Kurz examine ces questions dans L'Etat n'est pas le sauveur suprême (Crise & Critique, 2022).
Il revient sur les principales pensées politiques tant fondatrices et apologétiques que critiques et oppositionnelles, en cherchant à établir des fondements nouveaux pour une théorie critique de l'État.
Son point de départ étant tout autant les limites de la critique anarchiste de l'État chez Bakounine, que la réflexion fragmentaire et conceptuellement incohérente de Marx et Engels, telle qu'elle apparaît dans la confrontation avec les partisans de Bakounine et à propos de la Commune de Paris.
Quelles sont les origines du capitalisme ? L'interrogation paraît simple et pourtant il n'existe aucun consensus parmi les historiens. Certains estiment sa genèse à deux siècles, d'autres à cinq ou huit siècles, voire à plusieurs millénaires. Il n'existe pas davantage d'accord sur la nature des facteurs à prendre en compte, ni, plus surprenant encore, sur la définition même du capitalisme.
En adoptant un critère rigoureux pour distinguer le capitalisme des simples pratiques commerciales et monétaires, l'historien Jérôme Baschet remet en question bien des modèles historiques classiques et explore la complexité des forces à l'œuvre dans la transition du féodalisme au capitalisme. Il interroge les dynamiques internes de la société médiévale, soulignant les spécificités de la trajectoire européenne tout en récusant les biais eurocentriques.
Défendant une perspective discontinuiste, il souligne que cette transition représente une rupture radicale dans l'histoire humaine et planétaire, dont la portée se révèle pleinement dans le contexte actuel de crise climatique et écologique.
Sur les trois questions considérées - quand ? comment ? quoi ? -, Jérôme Baschet s'emploie à clarifier les termes des débats à mener, offrant ainsi une réflexion approfondie sur la formation historique du capitalisme, un monde caractérisé par l'autonomisation de l'économie et l'affirmation d'une logique d'illimitation, dont il nous est donné aujourd'hui d'éprouver les conséquences.
De l'Amérique latine à la Chine en passant par la Grèce, la Tunisie et l'Égypte, la dette a été utilisée comme une arme de domination et de spoliation. Le recours à l'endettement extérieur et l'adoption du libre-échange constituent à partir du XIXe siècle un facteur fondamental de la mise sous tutelle d'économies entières par les puissances capitalistes. La Grèce des années 2010 est un exemple supplémentaire d'un pays et d'un peuple privés de liberté sous le prétexte de rembourser une dette illégitime.
Cette dictature de la dette n'est pas inéluctable. En deux siècles, plusieurs États ont annulé leurs dettes avec succès. Eric Toussaint analyse les répudiations réalisées par le Mexique, les États-Unis, Cuba, le Costa Rica et la Russie des soviets. Il met en lumière et actualise la doctrine de la dette odieuse.
Envers et contre elle, Annie Le Brun traverse l'époque. Elle occupe ce point où sensible et politique, littérature et subversion, restent indissociables. L'expérience du surréalisme dont elle témoigne est tout le contraire d'un mythe, le contraire d'un passé. On y entend le vif des rencontres et de le plein des singularités, la puissance du collectif quand il chemine vers l'inconnu. Autant dire que sa manière de soutenir les désirs, de chasser toute tendance à la résignation ou de faire entendre la joie d'être ensemble, continue à résonner en nous.
On parlé ici d'esthétique critique, de communisme des ténèbres et de ces lignes de crête sur lesquelles il faut se tenir pour rester inaccaparé. Ou encore, de ces "réserves monstrueuses de beauté" dans lesquelles puiser pour "se garder de reculer et de subir".
Sociologue et marxiste, Alain Bihr a principalement travaillé sur la justice sociale, les inégalités au sens large, l'extrême droite et le capitalisme.
De 2018 à 2019, il publie Le Premier âge du capitalisme en 3 tomes, une œuvre titanesque de près de 3'300 pages, qui détaille l'histoire des origines du capitalisme.
- 0'00'00 : Introduction
- 0'02'36 : Éléments décisifs chez Marx sur les origines du capitalisme
- 0'32'04 : Tome 1 : L'expansion européenne
- 0'45'08 : Tome 2 : La marche de l'Europe occidentale vers le capitalisme
- 0'59'11 : Tome 3 : Un premier monde capitaliste
- 1'11'20 : Comment lire cet ouvrage monstrueux ?
La théorie critique de la société fait-elle face à la crise écologique comme à un défi qui l'oblige à se renouveler et à se transformer ? Poser la question en ces termes, c'est présumer que la théorie critique ne serait en réalité pas véritablement armée pour faire face au défi de la crise climatique et écologique, que son histoire et l'héritage qu'elle porte ne lui permettraient pas de l'affronter sans devoir subir un sévère aggiornamento. Ce jugement est aujourd'hui largement répandu, notamment au sein de l'éco-marxisme nord-américain.
Tout en reconnaissant que "l'une des contributions durables des théoriciens sociaux de l'École de Francfort, représentée en particulier par la Dialectique de la raison publiée en 1944 par Max Horkheimer et Theodor Adorno, a été le développement d'une critique philosophique de la domination de la nature", John Bellamy Foster et Brett Clark n'en estiment pas moins que, "lorsque le mouvement écologique a émergé dans les années 1960 et 1970, le marxisme occidental était, avec sa notion abstraite, philosophique de domination de la nature, mal équipé pour analyser les formes changeantes et de plus en plus périlleuses de l'interaction matérielle entre l'humanité et la nature".
Franck Fischbach se demande dans quelle mesure une telle critique de la catégorie de domination est fondée et dans quelle mesure aussi cela peut justifier de lui substituer la catégorie de "rupture métabolique". Est également posée la question de savoir si la liquidation de la catégorie de domination n'aurait pas le tort de s'accompagner de l'occultation d'un double lien auquel les théoriciens de Francfort accordaient à juste titre une importance considérable, à savoir d'une part le lien entre la domination de la nature et la domination sociale, et d'autre part (mais les deux sont inséparables) le lien entre raison et domination.
Une conférence organisée par le Centre d'études sur les médias, les technologies et l'internationalisation, dans le cadre du séminaire "Capitalisme Cognitif : communs, plateformes et crise écologique".