En tant que psychiatre dans un centre de rééducation fonctionnelle, Maurice Berger reçois des victimes d'agressions qui gardent des séquelles importantes. En tant que pédopsychiatre, il travaille avec des mineurs extrêmement violents qui déclarent tous "n'en rien avoir à foutre" des blessures qu'ils ont occasionnées, avec une absence totale d'empathie.
Pour ralentir l'augmentation de cette violence dans notre société, il faut donc remonter l'histoire psychique de ces mineurs dont un certain nombre deviendront des majeurs dangereux. De manière schématique, ils présentent une violence "individuelle" liées à des maltraitances vues ou subies dans l'enfance, ou une violence liée à un milieu familial clanique, ou une violence commise en bande où le rôle du leader négatif est essentiel.
Le point commun est que les sujets concernés ne savent pas ce que c'est qu'obéir, à la loi entre autre, et que toute contrainte est ressentie par eux comme une insupportable soumission.
Pour Ibn Khaldûn, immense historien arabe du XIVe siècle, l'État "civilise" au plein sens du terme, il crée une société civile, pacifique et désarmée. L'État trace une limite claire entre la société sédentaire, qui vit sous sa protection, et la société bédouine, tribale, qu'il ne contrôle pas. Mais il a besoin des deux mondes, puisqu'il tire du monde tribal la violence nécessaire pour imposer sa paix dans le monde sédentaire, où il puise ses richesses à travers l'impôt. Si on donne à ces termes, "sédentaire" et "bédouin", leur véritable sens, c'est-à-dire "sous le contrôle d'un État" et "hors du contrôle d'un État", la pertinence de la théorie peut être étendue très au-delà de l'Islam et du Moyen Âge.
Pour comprendre cette fascinante théorie utile à notre temps, Gabriel Martinez-Gros, avec toute la finesse et l'érudition qui lui sont coutumières, nous présente les lignes de force de l'œuvre d'Ibn Khaldûn pour nous permettre d'en cerner la richesse et la portée.
- 0'00'00 : Intro
- 0'00'45 : Qui est Ibn Khaldûn ?
- 0'08'55 : Développement de la dialectique entre bédouin et sédentaire
- 0'15'27 : Une logique de la violence chez Ibn Khaldûn
- 0'19'31 : La philosophie de la temporalité politique marche-t-elle ?
- 0'29'06 : Ibn Khladûn semble avoir une conception très moderne du travail
- 0'35'40 : N'est-ce pas étonnant la faible place de la religion dans sa pensée ?
- 0'41'26 : Vous dites que la théorie d'Ibn Khaldûn ne fonctionne pas pour l'Europe. Pourquoi ?
- 0'52'16 : Pour vous, nous vivons une actualité "khaldunienne" aujourd'hui.
- 1'04'25 : Selon vous et Kamel Daoud, la langue arabe littéraire est une invention et il n'existerait que DES langues arabes ?
- 1'09'38 : On dit souvent que la "vraie" langue arabe, c'est celle du Coran et on a vu le cas d'Al Jazeera incomprise par une part importante des arabophones.
- 1'11'48 : A l'époque d'Ibn Khaldûn, était-ce déjà sous domination ottomane ?
- 1'18'27 : Quelles langues parlait Ibn Khaldûn ?
- 1'20'27 : En vous écoutant, on a l'impression qu'il n'y a aucun point commun entre les dominés et les dominants
- 1'28'40 : Outro
Pour Ibn Khaldûn, immense historien arabe du XIVe siècle, l'État "civilise" au plein sens du terme, il crée une société civile, pacifique et désarmée. L'État trace une limite claire entre la société sédentaire, qui vit sous sa protection, et la société bédouine, tribale, qu'il ne contrôle pas. Mais il a besoin des deux mondes, puisqu'il tire du monde tribal la violence nécessaire pour imposer sa paix dans le monde sédentaire, où il puise ses richesses à travers l'impôt. Si on donne à ces termes, "sédentaire" et "bédouin", leur véritable sens, c'est-à-dire "sous le contrôle d'un État" et "hors du contrôle d'un État", la pertinence de la théorie peut être étendue très au-delà de l'Islam et du Moyen Âge.
Pour comprendre cette fascinante théorie utile à notre temps, Gabriel Martinez-Gros, avec toute la finesse et l'érudition qui lui sont coutumières, nous présente les lignes de force de l'œuvre d'Ibn Khaldûn pour nous permettre d'en cerner la richesse et la portée.
En tant que psychiatre dans un centre de rééducation fonctionnelle, Maurice Berger reçois des victimes d'agressions qui gardent des séquelles importantes. En tant que pédopsychiatre, il travaille avec des mineurs extrêmement violents qui déclarent tous "n'en rien avoir à foutre" des blessures qu'ils ont occasionnées, avec une absence totale d'empathie.
Pour ralentir l'augmentation de cette violence dans notre société, il faut donc remonter l'histoire psychique de ces mineurs dont un certain nombre deviendront des majeurs dangereux. De manière schématique, ils présentent une violence "individuelle" liées à des maltraitances vues ou subies dans l'enfance, ou une violence liée à un milieu familial clanique, ou une violence commise en bande où le rôle du leader négatif est essentiel.
Le point commun est que les sujets concernés ne savent pas ce que c'est qu'obéir, à la loi entre autre, et que toute contrainte est ressentie par eux comme une insupportable soumission.
Ancien colonel de l'armée de terre et désormais historien, écrivain et essayiste, régulièrement invité sur les plateaux des médias, Michel Goya est l'auteur de plusieurs livres traitant de l'histoire militaire et l'analyse des conflits.
L'occasion de revenir sur son parcours, la rôle de l'armée, la question de l'engagement mais aussi de la guerre dans la société civile.
Trois décennies après la fin de la Guerre froide, la popularité du concept de totalitarisme n’a pas faibli. Au cœur des programmes scolaires, et fréquemment employée dans le débat public, la notion est pourtant ignorée voire rejetée par une grande partie des historiens actuels. Ils reprochent au "totalitarisme" d'être une abstraction ne décrivant que superficiellement le nazisme, le stalinisme ou la Révolution française – dont une historiographie très diffusée en a fait la matrice du totalitarisme.
Comment alors comprendre l'omniprésence d'un concept faisant ombre à des clés de compréhension historique plus pertinentes ? L'histoire du terme de totalitarisme nous apprend qu'il est une catégorie plus polémique que scientifique. S'il s'agissait pendant la Guerre froide d'assimiler l'adversaire soviétique au nazisme, c'est-à-dire au dernier degré du mal, le "totalitarisme" sert désormais à disqualifier tout projet ambitieux d'émancipation collective. En expliquant avant tout les crimes des régimes totalitaires par la volonté de transformer le monde d'après un idéal, le concept de totalitarisme insuffle dans la société l'idée insidieuse qu' "il n'y a pas d'alternative" puisque toute alternative à notre monde au nom de l'égalité contiendrait la potentialité d'un crime de masse.
Pour discuter de ces enjeux, Le Vent Se Lève recevait à la Sorbonne le 26 avril dernier, deux spécialistes de la question : Johann Chapoutot, historien spécialiste du nazisme ayant mis en évidence certains traits contre-intuitifs du IIIe Reich : sa « normalité » dans l’Occident du début du XXe siècle, sa « rationalité », ainsi que son caractère anti-étatiste. Ce dernier trait infirme la vision d’un nazisme « totalitaire », compris comme voulant instaurer la suprématie d’un État tout-puissant sur tous les aspects de la vie.
Sophie Wahnich, historienne de la Révolution française. À rebours des analyses faisant de l’épisode de la Terreur la « matrice des totalitarismes », Sophie Wahnich s’intéresse à la violence politique révolutionnaire, non pour la vilipender mais pour l’analyser et la comprendre. Elle souligne la dimension rituelle – destinée à satisfaire un besoin de vengeance populaire par le spectacle – , sacrificielle et paradoxalement émancipatrice – la liberté se fondant sur le sang des aristocrates – de la violence révolutionnaire, elle aussi, irréductible à un quelconque « projet totalitaire ».
Surtout connu pour ses prises de positions polémiques, l'écrivain, réalisateur et éditeur Alain Soral nous parle ici des sports de combat dont il est un pratiquant accompli depuis plusieurs décennies.
Après avoir commencé la boxe française dès l'âge de 20 ans, il passe ensuite à la boxe anglaise et décroche son diplôme d'instructeur fédéral en 2004.
Dans cet échange, il revient sur l'actualité de la boxe, le succès mondial du MMA, la réalité des combats de rue et l'efficacité de la self-défense.
Titulaire de la chaire "Histoire contemporaine du monde arabe", Henry Laurens nous propose de nous arrêter dans l'atelier de l'historien afin de comprendre ses enjeux et ses concepts. En 2013 déjà, dans la revue Débat, il rappelait l'opposition entre le rôle des historiens et la société, "le besoin de savoir ne doit pas se transformer en posture d'accusateur, voire en juge et en jury. Si, à la rigueur, on peut assimiler l'historien à un juge d'instruction qui instruit à charge et à décharge, il n'est pas là pour effectuer le reste de la procédure judiciaire". Il souligne également ici que "les historiens doivent reconnaître qu'ils ne sont pas les maîtres de la représentation du passé. Ils ne sont que les artisans du segment scientifique de la mémoire".
Après avoir rappelé les bases de la connaissance historique, Henry Laurens pose la question des comparatismes et revient sur le développement de l'orientalisme et l'occidentalisme de l'époque moderne à la décolonisation. Avant d'ouvrir l'enquête sur ce qu'il appelle le "passé imposé", il revient sur les différentes formes de violences au XXe et au XXIe siècles et fait état d'un passage de la figure du combattant à celle de la victime, d'une culture de la guerre à une culture de la paix, tandis qu'il note que le djihadisme au XXIe siècle relève des deux cultures.
Alors que la demande sociale de "thérapies mémorielles" va croissant, il est salutaire que l'historien prenne du recul face à sa pratique pour comprendre les spécificités de sa mission, de ses productions et de ses outils de travail.