Ils ont pour nom de guerre les "Black Blocs", les antifas, les autonomes, les zadistes. Ils se définissaient hier comme situationnistes, conseillistes, luxemburgistes, marxistes libertaires, anarcho-communistes. Ce sont eux les "infiltrés", les "provocateurs", les "casseurs" qui, au sein des manifestations, affrontent les policiers, vandalisent les commerces, dégradent les monuments. Eux qui occupent et radicalisent les fronts politiques, humanitaires ou écologiques, qui ferraillent au nom des Gilets jaunes, des sans-papiers, des néoruraux, des altermondialistes. Eux qui s'emparent de chaque foyer de contestation pour en faire un axe d'insurrection. Ils forment l'ultra-gauche, cette mouvance qui se veut à la gauche de l'extrême gauche. On la croyait finie. Elle est aujourd'hui plus active que jamais.
Christophe Bourseiller nous fait découvrir l'histoire de cette nébuleuse dissidente et la géographie de cet univers militant. Il raconte la chronique secrète de cette avant-garde critique de l'idéologie mais aussi de la culture, de la pensée, des arts. Il dessine le culte de la violence révolutionnaire qui l'anime.
Un travail d'investigation éclairant qui nous permet de plonger dans une des marges de l'agitation politique.
Selon le politologue Olivier Roy, nous n'avons pas affaire aujourd'hui à une radicalisation de l'islam, mais à l'islamisation de la radicalité. Depuis 1996 le phénomène est stable : le passage à l'acte terroriste concerne essentiellement la deuxième génération d'immigrés et les convertis "de souche" appartenant à la même tranche d'âge (ceux-ci n'ayant jamais souffert du racisme ou de l'exclusion). C'est donc ailleurs que dans la révolte contre des discriminations subies qu'il faut chercher les causes de leur engagement.
Pour Olivier Roy celles-ci résident essentiellement dans un commun conflit de générations où nihilisme et orgueil sont profondément liés. Fascination pour leur propre mort et jouissance de la toute-puissance conférée par la volonté de tuer leur tiennent lieu de religion. Tous ces prétendus djihadistes n'ont jamais pratiqué un islam communautaire et leur servir un "islam modéré" ne sert donc à rien car c'est la radicalité qui les attire.
Théoricien littéraire fasciné par les sciences sociales, né en Avignon en 1923, René Girard est l'un des grands penseurs de la deuxième moitié du XXe siècle. Il a fondé sa pensée sur les écritures saintes, autant lues que les grands classiques de la littérature (Proust, Stendhal ou Dostoïevski).
Il est spécialement connu pour son concept de "désir mimétique" qu'il définit ainsi : "c'est toujours en imitant le désir de mes semblables que j'introduis la rivalité dans les relations humaines et donc la violence". Pour lui, la Bible est une immense entreprise pour sortir l'homme de la violence.
Cette émission nous invite à découvrir la pensée de cet archiviste-paléographe de formation qui était installé depuis 1947 aux Etats-Unis.
Il est ici question du néolibéralisme sur le terrain qui, dès ses origines, fut le sien : le choix de la guerre civile en vue de réaliser le projet d'une pure société de marché. Une guerre de domination polymorphe qui sait parfois se doter des moyens de la coercition militaire et policière, mais qui se confond souvent avec l'exercice du pouvoir gouvernemental et qui se mène dans et par les institutions de l'État.
De Hayek à Thatcher et Pinochet, de Mises à Trump et Bolsonaro et de Lippmann à Biden et Macron, le néolibéralisme a pris et prend des formes diverses selon ce que commandent les circonstances. Et ce qui apparaît, dans cette perspective stratégique, c’est l'histoire d'une logique dogmatique implacable qui ne regarde pas aux moyens employés pour affaiblir et, si possible, écraser ses ennemis...
Pourquoi les femmes se poussent-elles mutuellement à ressembler à ce que veulent les hommes ? D'où viennent nos penchants racistes et pourquoi nous ont-ils souvent servis ? Pourquoi l'université devient-elle peu à peu une coquille vide où le débat contradictoire disparaît ?
Voilà quelques-unes des questions auxquelles tente de répondre Peggy Sastre, journaliste et docteur en philosophie des sciences, publiant régulièrement sur des sujets d'actualité dans des revues telles que Slate, Marianne, Le Point et Causeur.
Très critique à l'égard des tendances identitaires et culturalistes du mouvement féministe post-moderne, elle défend sans relâche la liberté d'expression et la rationalité scientifique, aujourd'hui attaquées de toutes parts.
Un entretien mené par Pierre Schweitzer.
Cet entretien en marge de l'exposition "Traces du sacré" au Centre Pompidou offre à l'auteur de La Violence et le Sacré la possibilité de s'exprimer conjointement sur l'histoire, les écrivains, les philosophes et les artistes. Sont alors évoqués Clausewitz, Hölderlin, Hegel, Nietzsche et Dostoïevski, mais aussi Stendhal, Baudelaire, Stravinski, Nijinski et Proust.
Partant, c'est toute son œuvre que René Girard a prise à rebours, commençant par sa récente réflexion sur la rivalité franco-allemande dans Achever Clausewitz pour remonter jusqu'aux premières intuitions de Mensonge romantique et vérité romanesque.
Cette discussion avec Benoît Chantre prend la forme d'un palindrome : commencée avec Clausewitz, elle s'achevet sur Proust. De Iéna à Combray, de l'enfer de la guerre au paradis de l'enfance, nous sommes ainsi passés d'une apocalypse à l'autre : de la "montée aux extrêmes" à la révélation finale du Temps retrouvé.
Et si René Girard évoque ici la distance qu'il a vite ressentie à l'égard de l'art moderne, c'est l'Histoire qu'il cherche à penser quand il quitte l'Europe pour les Etats-Unis, son sens qu'il scrute à travers les textes littéraires. Et c'est bien sa "conversion romanesque" qui lui donne les clés d'une œuvre qui remontera jusqu'au religieux archaïque révélé à la lumière des Evangiles.
- 0'00'00 : Introduction
- 0'02'00 : Clausewitz et Napoléon
- 0'16'40 : Hegel et le christianisme
- 0'21'00 : Hölderlin, Dostoïevski et Nietzche
- 0'42'15 : La France et l'Allemagne ou Baudelaire et Wagner
- 0'53'50 : Le Sacre du printemps
- 1'12'30 : Les Etats-Unis, Simone Weil
- 1'28'40 : Marcel Proust
Michel Goya est un essayiste particulier, qui allie la vocation militaire à la rigueur de l'historien. Dans le cadre de cet entretien, il revient sur deux de ses livres, Sous le feu. La mort comme hypothèse de travail (Tallandier) et S'adapter pour vaincre (Perrin).
L'occasion de développer des thématiques aussi différentes que l'expérience du feu, la formation des soldats et le problème des "savoir-faires disparus" à certaines époques au sein de l'institution, son intérêt pour la Grande guerre et la manière dont celle-ci fonctionne comme un cas d'école du changement en contexte de guerre, la problématique de l'innovation technique ou encore la notion de "doctrine", centrale dans le fonctionnement militaire, de sa naissance au XIXe siècle jusqu'à ses mutations contemporaines.
Émission "Le Collimateur", animée par Alexandre Jubelin.