Mathématicien et philosophe, Olivier Rey analyse dans ses essais le rôle crucial de la taille dans la dynamique des sociétés humaines, jusqu'aux éventuels effondrements qui peuvent s'en suivre. Il explore également les limites du progrès technique et les dérives d’une humanité dépassée par ses propres créations technologiques.
Dans cet entretien, il nous offre des pistes de réflexion pour comprendre pourquoi l'humanité est arrivée à un point critique de son évolution, notamment en raison de sa capacité d'innovation technique, et nous invite à changer de trajectoire pour nous en remettre à d'autres formes de sagesse.
Un point de vue indispensable pour saisir les enjeux de notre époque et les limites d'une modernité démesurée.
- 0'00'00 : Introduction
- 0'00'56 : Les ressorts de la crise politique actuelle
- 0'08'55 : L'absence de sens dans la société de consommation
- 0'10'39 : L'humanité face au franchissement des seuils
- 0'29'21 : Le règne des mathématiques
- 0'37'05 : Du silex à la centrale nucléaire, l'homme écrasé par la technique
- 0'44'00 : Quand la technologie devient contreproductive
- 0'49'45 : La faillite de la politique face au devenir technique du monde
- 0'56'53 : Tik Tok et la revanche de la Chine
- 1'05'00 : La facture écologique et énergétique de la technologie
- 1'07'44 : L'impasse de la géoingénierie
- 1'12'15 : Tainter et la fragilité des sociétés complexes
- 1'14'19 : Misère du transhumanisme
- 1'23'08 : Renoncer à la démesure
Un entretien mené par Thomas Arrighi.
C'est à partir du problème que l'existence même de la bombe atomique pose à la pensée que Félix St-German nous introduit à la pensée de Günther Anders, saisie depuis son ouvrage majeur L'Obsolescence de l'homme dans lequel l'auteur une implacable "critique de l'ère de la technique".
L'occasion de comprendre sa méthode "occasionnaliste" ses concepts de décalage prométhéen et de honte prométhéenne, soit un monde non seulement configuré par ses objets techniques, mais où ceux-ci déterminent également les critères de valeurs pour s'ériger en idéal.
Dans les débats sur les promesses du transhumanisme, on questionne l'immortalité, le contrôle de l'humanité par la machine intelligente, ou la modification de notre génome.
Il faudrait plutôt s'interroger respectivement sur le rapiéçage des corps et ses limites, la manipulation par quelques humains de mécanismes puissants et obéissants, ou la sélection itérative de nos enfants. Ces perspectives sont déjà d'actualité sans faire réellement débat.
Concevoir le transhumanisme comme l'exacerbation illimitée du progrès médical permettrait de remettre en cause certaines pratiques actuelles.
Comment les objectifs militaires nazis ont-ils influencé la conquête spatiale ? Le vol habité est-il nécessaire ? Qu'est-ce qui se cache derrière les projets fous d'Elon Musk ?
À l'heure de la course vers Mars, les auteurs du livre Une histoire de la conquête spatiale (La Fabrique) Arnaud Saint-Martin et Irénée Régnauld nous dévoilent l'envers de la conquête spatiale.
- 00'00 : Présentation, conquête spatiale et colonialisme d'Elon Musk
- 08'20 : L'importance des nazis et l'URSS dans le développement de la conquête spatiale
- 12'45 : Le secret bien gardé des Etats-Unis
- 17'40 : Le développement de l’astroculture
- 25'11 : Néolibéralisme et conquête spatiale
- 35'12 : L'influence de la SF sur Musk et Bezos
- 40'00 : Le problème des satellites et dangers
- 45'21 : La station spatiale ne sert à rien ?
- 54'00 : Et après ?
Un entretien mené par Samuel Fergombé.
À l'heure de la crise écologique, le dogme révolutionnaire de la "réappropriation des moyens de production" ne peut plus être affirmé innocemment. Moteur humain, moteur mécanique : ce sont là les bases de l'invention capitaliste du "travail". La croyance en la substituabilité indéfinie d'une dépense d'énergie abstraite nourrit le développement technologique et entretient une relation ambivalente avec la thermodynamique.
Une conception substantialiste de la valeur, telle que développée par Karl Marx et relue par Robert Kurz, permet de réinscrire le paradigme énergétique à l'intérieur de la forme sociale capitaliste et d'en expliciter la dynamique propre. Le rapport de composition organique du capital articule en effet étroitement le "travail mort" des machines et le "travail vivant" des
humains. La crise énergétique et ses retombées écologiques constituent en ce sens le mur externe du métabolisme capitaliste, l'autre mur étant la création d'une humanité superflue.
L'abolition du travail abstrait ne pourrait donc que signifier la fin des technologies qui sont la "matérialisation adéquate" du capitalisme. Seule une exigence d'émancipaton portée jusqu'à cette pointe pourrait à la fois cesser de consumer sans limites le monde matériel et offrir les bases sociales d'une réinvention des techniques et des activités libérées de la compulsion de valorisation.
La technique semble désormais empiéter sur tous les domaines de l'activité humaine. La science se transforme en technoscience. La morale se fait gestion des ressources et management. La parole est livrée aux techniques de communication ; l'amour, au Kâma-Sûtra. Il n’est pas même jusqu'à l'évangélisation qui ne soit atteinte : on la conçoit aisément comme la nécessité d'allier Facebook à la Sainte Face, et Twitter à l'Esprit Saint. Il ne s'agit plus d'être, mais de faire (l'amour ou un beau discours). Mais un faire qui ne se fonde plus sur l'être ne peut en vérité que défaire, et sa volonté de puissance cache une impuissance radicale, qui asservit au lieu d'élever, qui manipule au lieu d'engendrer.
L'enjeu du cours de Fabrice Hadjadj est donc, avec Aristote et saint Thomas, de distinguer la technè (faire), de la praxis (agir) et de l'epistèmè (savoir), pour montrer en quoi le savoir-faire n'est pas d'abord un savoir, et en quoi la perfection de l'art ne se situe pas sur la même ligne que la perfection morale : la confusion, aussi bien que la séparation de ces trois espèces de vertu, est désastreuse.
Il montre également comment s'est opéré le passage de la technè des Anciens à la technique des Modernes, pour essayer de penser l'empire technocratique de notre époque (qui ne semble d'ailleurs plus une époque, mais un délai).
Ce sont bien les écrans qui font écran, en dépit de leurs nombreuses "fenêtres" et "icônes", et nos GPS qui nous égarent systématiquement, quand il s'agit d'être simplement ici...
La science possède son histoire et les enjeux auxquels elle a dû faire face n'ont pas toujours été les mêmes. Depuis plus de 150 ans, la science a un impact déterminant sur nos sociétés. Au fil des décennies, de nombreux débats ont émergé autour du rôle de la science. Certains ont envisagé un avenir de progrès et d'innovation sans limites, où les découvertes scientifiques révolutionneraient notre existence de manière positive. D'autres, cependant, ont exprimé des préoccupations quant aux implications éthiques et aux conséquences indésirables qui pourraient découler du développement scientifique.
L'historien François Jarrige revisite ces débats en réexaminant les arguments qui ont été présentés de part et d'autre afin d'explorer les concepts clés qui ont émergé autour du progrès technologique et d'ouvrir une vision prospective sur l'avenir de la science.
À partir de la théorie critique développée initialement par l'École de Francfort, Maxime Ouellet a comme ambition de saisir les fondements sociohistoriques des catégories centrales qui sont au fondement de l'intelligence artificielle : la communication, la commande, le contrôle et l'information.
Après avoir d'abord situé les développements de l'intelligence artificielle dans le sillage des premiers travaux issus de la cybernétique, dans le cadre de ce qui était qualifié à l'époque de capitalisme monopoliste d'État, il pose ensuite la question visant à savoir si les mutations contemporaines du capitalisme rendues possibles grâce aux avancées dans le domaine de l'IA tel que le machines learnig et le deap learning remettent en question la possibilité de développer une théorie critique de la société.