Nervosité dans la civilisation. De la culture de la performance à l'effondrement psychique. Avec Alain Ehrenberg à l'Université de tous les savoirs.


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23.10.2000

Le basculement d'une société organisée par la discipline à une société fonctionnant à l'autonomie est l'objet de cette conférence. Je suivrai ici le fil directeur des transformations de la drogue et des pathologies mentales, plus particulièrement celui de la dépression, dans nos sociétés en prenant comme angle d'attaque les changements ayant affecté l'individualité contemporaine au cours de la deuxième moitié du XXe siècle et les tensions qui le traversent.
Je montrerai d'abord comment la dynamique d'émancipation, qui émerge au cours des années 1960, a progressivement dessiné un type d'individu qui est le propriétaire de lui-même et a produit un pluralisme normatif extrême d'où ressortent de multiples revendications identitaires. Ce phénomène conduit à une situation de l'individualité qu'avait parfaitement pressentie Claude Levi-Strauss en 1960 : "tout se passe comme si chaque individu avait sa propre personnalité pour totem".
Je décrirai ensuite comment les exigences d'action, d'autonomie et d'initiative personnelles se sont ajoutées au pluralisme normatif, au cours des années 1980, induisant un mode de vie caractérisé par des normes de dépassement de soi, sur le modèle de la compétition sportive. Ce double processus a abouti à un phénomène tout à fait nouveau de par sa visibilité, à savoir une sensibilité très forte à la souffrance psychique dont les dépressions et les addictions sont à la fois les symboles et les prototypes. Du culte de la performance à l'effondrement psychique, nos sociétés ont fini par donner forme à une culture du malheur intime parfaitement inédite. La performance, l'épanouissement individuel et la vulnérabilité de masse forment un tout que j'appelle la nervosité dans la civilisation.

Vers un 3e capitalisme industriel : critique de la mécroissance et économie de la contribution. Avec Bernard Stiegler au Club 44 à la Chaux-de-Fond.


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05.11.2009

Bernard Stiegler nous délivre ici sa réflexion sur la situation passée, présente et à venir du capitalisme, en gardant au coeur de son analyse la question de la technique. 
Il soutient que la société industrielle a connu jusqu’à présent deux grands modèles organisationnels. 
Le premier est le productivisme, qui domina XIXe siècle. Fondé sur le machinisme industriel qui engendre une augmentation spectaculaire de la productivité, il bénéficie presque exclusivement à ce que l’on appelle alors la bourgeoisie – petite, moyenne ou grande. 
Au XXe siècle, une autre organisation de la société industrielle se met en œuvre aux États-Unis, pour se répandre ensuite dans le monde entier. Ce n’est plus seulement une organisation de la production, mais aussi de la consommation. La stimulation de la consommation s’opère à travers les techniques de marketing. 
C’est ce modèle caractéristique du XXe siècle qui s’est effondré au mois d’octobre 2008. La faillite de General Motors n’est pas qu'une conséquence des spéculations de l’économie virtuelle dans le monde de l’économie réelle : à travers cette crise, c’est le modèle consumériste qui a rencontré ses limites dans une combinaison de facteurs toxiques que cette conférence propose d’analyser comme une mécroissance. L’enjeu est alors de repenser la croissance sur de nouvelles bases.
Bernard Stiegler soutiendra que l’avenir de la croissance, qui suppose le dépassement de la "mécroissance", consiste en une économie de la contribution où l’opposition fonctionnelle entre production et consommation devient caduque.

Economie libidinale et économie politique. Avec Bernard Stiegler à l'association Isegoria.


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17.03.2009

La société industrielle a connu jusqu’à présent deux grands modèles organisationnels : le productivisme qui domine le 19e siècle et, au 20e, l’organisation de la production et la stimulation permanente de la consommation par la stimulation et la captation de la libido des individus, destinée à parer à la baisse tendancielle du taux de profit.
Ce dernier modèle, basé sur la prééminence du marketing, s’est effondré à la crise de 2008.
Quelles sont les alternatives ? Comment peut-on parer à l'effondrement complet de notre société ? Peut-on envisager une économie de la contribution ?

Adolescence et obsolescence : comment est-il possible de devenir adulte dans un monde jetable ? Avec Bernard Stiegler au CHU de Nantes.


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24.11.2012

Le capitalisme, au XXè siècle, et en vue d’absorber les excédents de la production industrielle, a fait de la libido sa principale énergie en la canalisant sur les objets de la consommation. Or, aujourd’hui, cette captation de la libido a fini par la détruire. Ce fait majeur constitue une immense menace pour la civilisation industrielle et a fortiori pour l'individuation des adolescents.
C'est le problème de la transmission par l'intermédiaire du milieu technique qui est donc ici posée.

La violence de l'idéologie publicitaire. Avec François Brune à Genève.


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09.02.2012

Ce qu’on appelle familièrement "la pub" est bien autre chose qu’un ensemble de réclames en faveur de produits ou services particuliers. Il s’agit d’un système qui quadrille toute la vie privée et publique, et qui diffuse en permanence une idéologie, c’est-à-dire à la fois une vision du monde et un mode d’emploi de la "vie".
On peut faire deux reproches à ce système :
 1. la nature aliénante de son idéologie (aspect qualitatif)
 2. le caractère massif de sa domination (aspect quantitatif)
Ce double aspect fait de la publicité une propagande constante, chargée de façonner et de réduire les gens au simple statut de consommateurs. Pour servir l’expansion sans fin de l’économie capitaliste, l’idéologie de la consommation se révèle l’autre face, indispensable, de la "marchandisation du monde".
Conférence donnée à la maison des associations de Genève, organisée par le "Réseau Objection de Croissance".

Addiction en société moderne et dépendance sans substance. Avec Julien Gautier à Bobigny.


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10.12.2009

"C’est en philosophe, et dans la lignée des travaux de Bernard Stiegler et de l’association Ars Industrialis, que je voudrais aborder ici la question de l’addiction en général, c’est à dire en fin de compte le thème du désir et de la vie, de la vie du désir, de la vie comme désir. Nous soutiendrons en effet que la vie elle-même, et sans doute la vie humaine d’une manière plus profonde encore, est addictive en son principe, dans la mesure où elle est animée par du désir, affectée, motivée, mobilisée par des « objets » auxquels elle s’attache et qu’elle investit et même sur-investit : aimer, c’est, en un sens, être « addict », ne pas pouvoir s’imaginer sans l’autre. De ce point de vue, nous proposerons d’interpréter le développement des addictions proprement pathologiques – ce que n’est pas toute addiction - comme le signe d’une dégradation du désir individuel et collectif, de sa régression au niveau d’un fonctionnement pulsionnel, compulsif et monomaniaque. Or, nous voudrions montrer que ce type de comportement addictif est d’une certaine manière érigé en norme et pratiquement organisé par le capitalisme consumériste, dont le système repose fondamentalement sur la sollicitation incessante des pulsions d’achat des consommateurs par le marketing : en ce sens, la société de consommation est en elle-même une société d’addiction, et par là addictogène, qui surexploite, épuise et dérègle aussi bien les milieux psychiques et sociaux que les milieux naturels." Julien Gautier
Conférence prononcée dans le cadre d'une journée consacrée à l'éducation par l'association de consultation familiale SAGA à Bobigny.