Avec la loi de séparation des Églises et de l’État (1905) puis son inscription dans la Constitution (1946 et 1958), la laïcité apparaît en France comme une référence cardinale, faisant désormais l’objet d’une reconnaissance aussi unanime qu’équivoque.
Il n’existe pourtant pas de "modèle français" unique de laïcité : seulement des visions divergentes qui s’affrontent dans un rapport de forces toujours évolutif. Dès l’origine, le contenu de la loi de 1905 constitue un enjeu entre quatre conceptions différentes de la laïcité. Celles-ci ont subsisté en s’adaptant, tandis que trois "nouvelles laïcités" sont apparues. Ces sept laïcités, Jean Baubérot les décrit en les qualifiant : laïcité antireligieuse, laïcité gallicane, laïcité séparatiste stricte, laïcité séparatiste inclusive, laïcité ouverte, laïcité identitaire, laïcité concordataire.
Le philosophe Philippe Nemo a longuement travaillé sur l’histoire des idées politiques en Europe. Il a acquis la conviction non seulement que le libéralisme est compatible avec le christianisme, mais qu’il en a directement ou indirectement jailli. Ce serait la révélation biblique qui a produit peu à peu, dans le monde méditerranéen et européen et particulièrement pendant la "révolution papale", les profondes transformations socio-politiques qui devaient finalement aboutir aux démocraties libérales modernes.
Une conférence qui s'inscrit dans le cadre du séminaire 2016 "Les Fondements de la Société Européenne".
Quand une conception politique de la nation affronte une idée charnelle de la même réalité, cela donne un débat entre Jacques Sapir et Jean-Yves Le Gallou.
Deux approches différentes, qui se rapprochent parfois mais s'affrontent souvent, pour répondre à une même question : que pouvons-nous faire pour sortir la France de ses problèmes ?
Dans la première partie de cet entretien, l'auteur de "Occident et Islam" se focalise sur un des aspects dévoilé dans son livre, à savoir le réformisme islamique, ses origines et son influence aujourd'hui dans le monde musulman.
Dans un second temps, il met en lien la relation entre le messianisme judéo-protestant et la fratrie dite des "frères musulmans". Ceci étant illustré par la personnalité trouble de Tariq Ramadan.
Les multiples facettes de la pensée politique arabe contemporaine depuis le XIXe siècle sont pleinement inscrites dans la richesse d’une culture trop méconnue. Ses acteurs, loin d’être figés dans le carcan théologico-politique décrit par certains récits canoniques sur les Arabes et l’islam, ont souvent exprimé une pensée critique forte, sur les plans religieux et philosophique, anthropologique et politique. La marginalisation forcée de cette pensée politique arabe a facilité l’installation hégémonique de la pensée islamiste, instrumentalisée par certains régimes locaux, comme par leurs protecteurs occidentaux.
Un retour à la paix dans cette région tourmentée qu’est le Proche-Orient dépend largement de la reconnaissance de la puissante dynamique de cette pensée, critique et profane, loin de l’image sclérosée qui en est souvent donnée.
La réponse aux attentats de janvier 2015 appelait un renouvellement des idées, des dispositions et des actions de notre pays. Perdurent au contraire les manières de penser les plus paralysantes : la "laïcité" serait la solution au "problème de l'islam", l'effacement de la présence publique du religieux serait la solution au problème des religions. Tout est faux dans cette thèse. Au lieu de chercher une neutralité impossible, qui couvrirait en fait une guerre sournoise, nous devons accepter et organiser la coexistence publique des religions, leur participation à la conversation civique.
En entrant dans la communauté nationale, l'islam est entré dans une nation de marque chrétienne, où les juifs jouent un rôle éminent. Toute politique qui ignore cette réalité court à un échec cuisant, et met en danger l'intégrité du corps civique. Il s'agit donc, tout en préservant la neutralité de l'État, de faire coexister et collaborer ces trois "masses spirituelles". Loin que la mondialisation réclame l'effacement de la nation et la neutralisation de la religion, c'est son indépendance politique et spirituelle, et son ouverture au religieux, qui permettront à la France de franchir en sûreté et avec honneur la zone de dangers dans laquelle elle est entrée.
Si la crise qui frappe le monde entier est certes une crise bancaire et financière, c'est d'abord la première crise de l'unification planétaire, affirme Hervé Juvin, qui cherche à montrer les logiques, les intérêts et les passions à l'œuvre derrière le désordre des systèmes, des actions et des comportements.
Le système occidental dominait le monde, mais c'en est fini. Il n'a plus le monopole du bien ni des certitudes. Nous vivons le renversement du monde.
Cette crise le rend sensible avec acuité, si elle n'en est pas la cause : elle révèle que l'économie ne peut constituer le fondement, hors marché, des sociétés.