En 1884, Huysmans publiait un ouvrage des plus singuliers : À rebours. Ce n'était pas un roman, ni non plus un essai : c'était une nouveauté insolite. Le héros, Des Esseintes, incarnait le décadentisme. Il était le parfait personnage "fin de siècle" qui avait choisi de se retirer loin des fatigues du monde, ne cherchant que le délié des jouissances esthétiques les plus rares.
Or Huysmans était un ami de Zola. Il s'était montré l'une des têtes importantes du Naturalisme. Et voilà qu'il rompait soudainement avec son engagement passé. Dès lors, malgré de brefs remords, il s'en allait vers sa vocation, qui était religieuse.
Il n'en reste pas moins que la publication d'À rebours marque une date capitale : celle de l'inquiétude. Le Chantre absolu du progrès, Victor Hugo va mourir l'année suivante et Huysmans met le Progrès en cause. Il va, par son livre hisser au premier plan Mallarmé, Villiers de l'Isle-Adam, Odilon Redon, Gustave Moreau, entre autres. Il va donner envie à ses contemporains de l'esthétisme catholique.
Bref, À rebours est un livre décisif, et Huysmans l'un des plus grands écrivains de notre littérature.
Émission "Une vie, une oeuvre", animée par Hubert Juin.
Par quelles crises, par quels errements des puissants, par quelles catastrophes enfin faudra-t-il passer avant qu’on ne parvienne à l’accomplissement des temps ?
C’est une question sans cesse posée, dans l’Ancien Testament, par les prophètes. Elle occupe le Livre de Daniel. Dans l’Islam, des hadiths disent que c’est au pays de Cham, en Syrie, que nous devrons nous réfugier et que c’est en Palestine que se déroulera l’ultime combat. Autour de Jérusalem, s’établira le règne de paix.
"L’enfant pourra alors mettre sans danger la main sur le trou de la vipère". C’est une formule de l’Apocalypse de Jean. Depuis le Nouveau Testament, le christianisme entretient lui aussi l’attente, qui se réveille régulièrement au long de son histoire.
Dans la seconde moitié du XIXe siècle, on lui donne un nom savant, tiré du grec "eskatos" : l’eschatologie, l’étude des fins dernières. A cette époque, en France, à la marge d’une Église catholique déjà chauffée à blanc par son intransigeance politique, une minorité de convertis se tient en faction : un cataclysme va se produire, les créatures vont expirer ou se redresser, l’arrêt de Dieu intervenir. Ce petit groupe est souvent composé de convertis. Parmi eux, les écrivains Léon Bloy, qui passe fugitivement dans le dernier livre de Michel Houellebecq, Soumission, et Joris-Karl Huysmans, qui en est le personnage central.
Emission "La marche de l'histoire", animée par Jean Lebrun.
Est reçu pendant cette conférence le très illuminant François Angelier, à la fois animateur et producteur de Mauvais Genres sur France Culture, co-coordonateur des éditions des écrits de Louis Massignon, auteur d’essais consacrés à Jules Verne, Léon Bloy et Paul Claudel, romancier sous le nom de François-Maxime Kulpa et directeur de la collection "Golgotha" aux éditions Jérôme Million.
Il nous donne une conférence consacrée au "Là-Bas" de Joris-Karl Huysmans, ce qui lui permet de revenir sur le satanisme au XIXe siècle et d'évoquer l’ex-abbé Boulan, Julie Thibault ou le Carmel d’Elie.