En 1755, dans son Traité des animaux, Condillac écrivait : "Il serait peu curieux de savoir ce que sont les bêtes, si ce n’était pas un moyen de savoir ce que nous sommes". Depuis l’Antiquité, le regard porté par l’homme sur le vivant nourrit une interrogation qui, au fil des siècles, depuis Aristote jusqu’à Descartes, puis jusqu’à nos jours, a suscité une multitude de débats philosophiques, scientifiques, idéologiques et religieux. A date récente, le développement de la recherche a conduit à se demander si les animaux ne sont pas des personnes. Il s’agit en fin de compte de savoir quelle est la place de l’homme dans la nature.
Konrad Lorenz disait que ceux qui refusent d’admettre que l’homme est un animal ont tort, mais que ceux pour qui il n’est rien d’autre qu’un animal ont tort également. Entre les hommes et les animaux, y a-t-il une différence de nature ou une différence de degré ? Par rapport aux sociétés animales, quelle est la spécificité des sociétés humaines ? Plus généralement, comment faut-il comprendre la façon dont s’articulent la nature et la culture ? Quelles leçons tirer des plus récentes découvertes scientifiques ? Peut-on encore jeter les bases d’une véritable anthropologie philosophique ? C’est à ces questions que s’efforce de répondre Alain de Benoist.
Si le vieux "marxisme orthodoxe" est définitivement hors d’usage, la profondeur de la crise économique, sociale, politique, mais aussi morale qui caractérise le mode de production capitaliste aujourd’hui rend nécessaire non seulement un retour à Marx qui doit être tout simplement lu véritablement et réinterprété, mais aussi aux écoles marxistes "hétérodoxes" du XXe siècle, celles qui sont parties de Marx pour aborder autrement et sous d’autres angles l’analyse critique de la société bourgeoise.
L'une d'entre elles -sûrement la plus importante- est l’école de Francfort et ce qu’il est convenu d’appeler la théorie critique, un terme générique qui rassemble toute une galaxie de penseurs, regroupés autour de l’Institut de recherche sociale.
Denis Collin commence par nous rappeler ce qu’est la théorie critique puis montre ensuite que les traits les plus saillants du capitalisme de notre époque trouvent une première élaboration chez les principaux penseurs rattachés à l’école de Francfort. Adorno, Horkheimer et les autres ont eu l’intuition de développements qui, aujourd’hui, sont sous nos yeux de manière parfois effrayante...
Depuis plusieurs années, les travaux de Lucien Cerise, initialement focalisés sur les techniques d'ingénierie sociale, ont permis de mieux comprendre les ambitions de la pensée transhumaniste, qui synthétise les velléités de contrôle des peuples avec les potentiels de la technoscience.
Car s'il s'agissait seulement d'encourager de nouveaux développements scientifiques, son intérêt serait mineure : cette entreprise entend plutôt produire une théorie unifiante qui permette aux nombreux décideurs d'imaginer un futur où l'humanité serait redéfinie selon leurs besoins.
Une réflexion salutaire qui nous fournit des armes pour combattre et résister.
Laurent Henninger, historien militaire de profession, s'est longuement intéressé à la problématique de l’émergence de la modernité guerrière, du XVe siècle à nos jours, dans le cadre du débat historiographique sur la "révolution militaire".
Ses réflexions l'ont amené à proposer une nouvelle grille de lecture utilisable dans des domaines aussi variés que la géopolitique, l'anthropologique ou la philosophie : le monde se partagerait entre espaces solides et espaces fluides qui s'articulent en réseaux.
Ce constat, qui peut apparaître relativement banal, devient très intéressant quand on commence à le penser sérieusement, et à en tirer les conséquences pratiques dans le cadre d'une politique de puissance.
Depuis le 11 Septembre, les actes de folie barbare ne cessent de se multiplier. Pourquoi ?
Pour Bernard Stiegler, c'est un symptôme de notre époque, qui réalise le rêve de la modernité. À travers la conquête du monde s'opère une désinhibition.
Alors, comment en sortir ? La réponse se trouve ici.
Émission "Les Nouveaux chemins de la connaissance", animée par Géraldine Mosna-Savoye.
L'un des penseurs chrétiens les plus importants du XXe siècle nous parle du devenir de notre "société technicienne" moderne, qui peut se définir par une recherche constante d'efficacité où les moyens prennent le pas sur les fins.
En seconde partie, c'est le sujet du christianisme qui est abordé : la foi chrétienne doit -ou devrait- nous offrir un axe de résistance possible contre le déchaînement technicien et la perte de sens qui est son corollaire.
Émission "Rencontres", animée par Marcel Brisebois.
Bernard Stiegler nous invite, dans cet entretien en 5 parties, à penser l’articulation entre la politique, le désir et la technique.
Partie I
Pour cette première partie, il revient sur le cœur de sa pensée, ce qui constitue pour lui l'impensé de l’histoire de la philosophie : la question de la technique comme participant de et à la constitution de l’homme. Il nous invite à un voyage au temps des présocratiques et des sophistes où, pour la première fois, la technique fut pensée comme potentiellement nuisible. Depuis la naissance de la métaphysique jusqu’au XVIIIe, la technique a principalement été pensée comme illusion. Depuis la première révolution industrielle jusqu’à nous, une accélération techno-logique prodigieuse s’est opérée. Au XXe, la technique est devenue synonyme de destruction, et l’humanité semble face à une impasse. Puis, il aborde le problème de la consommation devenue essentiellement souffrance. Le capitalisme est passé de la problématique de la "baisse tendancielle du taux de profit" à celle de l’adoption permanente de nouveaux objets de consommation. Ainsi le marché qu’exploite aujourd’hui le capitalisme est celui des consciences, par la captation de la libido vers les objets de consommation. Cet état de fait conduirait non seulement à un épuisement du désir, mais aussi à une destruction de ce que Stiegler nomme le narcissisme primordial.
Partie II
Bernard Stiegler développe ensuite son idée de la destruction du narcissisme primordial à travers trois évènements pour lui symptomatique d’une grande catastrophe : Le 11 septembre 2001, destruction du World Trade Center ; le 21 avril 2002, ascension de l’extrême droite au second tour de l’élection présidentielle ; le 26 mars 2002, assassina par Richard Durn de 8 conseillers municipaux à Nanterre. Il existerait aujourd’hui un désamour de l’humanité pour elle-même. Il faut se ressaisir et opérer une nouvelle critique du capitalisme. Bernard Stiegler revient sur les concepts Freudien de libido et de sublimation, laquelle est impossible sans singularité. Or, le capitalisme vise aujourd’hui la synchronisation globale et la destruction de toute singularité au profit de particularisme exploitable commercialement. En outre ce système désastreux exploiterait de véritable phénomènes d’addictions aux objets de consommation, ainsi qu’aux objets temporels que sont par exemple les programmes télévisuel. Cet état des lieux n’est pas une fatalité nous dit le philosophe. Il convient avant tout d’inventer de nouveaux modèles industriel. D’autres initiatives sont également à mettre en œuvre, comme le développement de communautés de praticiens et non d’usagers.
Partie III
La conférence proprement dite : que signifie aimer ? Bernard Stiegler développe sont point de vue en revenant sur un fait divers, celui des parents Cartier qui tentèrent d’assassiner leur enfants pour qu’ils accèdent à un monde meilleur. Si le jugement de ces parents a bien eu lieu, un autre jugement aussi important devrait avoir lieu : celui d’une organisation sociale infanticide qui favorise de tels comportements. Car ces parents étaient devenu esclaves d’un système marchand qui leur avait fait croire qu’aimer c’est acheter alors que plus ils achetaient moins ils aimaient. Pour le philosophe, ces personnes étaient intoxiqués et la désintoxication est une question éminemment politique. Il revient alors sur la destruction du désir, la dés-individuation, la misère symbolique et spirituel régnante, autant de symptômes d’une société hyper-industrielle qui se détruit elle-même. Il aborde également le problème des enfants turbulents, aussi appelé "enfants hyperactifs" qui souffrent de trouble de l’attention et auxquels ont prescrit des camisoles chimiques afin de les rendre plus docile et obéissants. Ces enfants, ces "délinquants en puissances" que le Président de la République propose de détecter et de ficher dès l’âge de 3 ans, pour lesquels l’Inserm propose une chimiothérapie, ces enfants, ont simplement besoin d’un peu d’attention, nous dit Bernard Stiegler.
Partie IV
Dans cette seconde partie de la conférence, Bernard Stiegler aborde la question du Théâtre. Question surdéterminée par la technique nous dit-il et notamment par celle de l’écriture. Dans l’antiquité, avec le théâtre, apparaît le public et le citoyen. Le théâtre interroge l’espace sacré, profane ainsi que le devenir et il participe à l’individuation psychique et collective. Pour Bernard Stiegler le théâtre est un culte et non un rituel. Il aborde alors la différence qu’il fait entre le plan des subsistances, le plan des existences et le plan des consistances. C’est au niveau des consistances que se joue le désir.
Partie V
Jeu des questions/réponses avec le public.
Dans le discours politique, l’emploi est devenu un impératif catégorique. Si les moyens pour parvenir au plein-emploi peuvent diverger, l’objectif de plein-emploi, lui, fait figure de bien commun dépassant tous les clivages politiques et sociaux.
Pourtant, la France n’a jamais été aussi loin du plein-emploi de tous et de chacun. D’un côté, le plein-emploi apparaît comme un objectif inconditionnel auquel on déclare s’attacher "à tout prix". De l’autre, la promesse d’un emploi à part entière – stable et à plein-temps – pour les 6 millions de chômeurs apparaît comme un horizon inatteignable.
On peut dès lors s’interroger sur le prix de l’emploi "à tout prix". Comment historiquement le plein-emploi est devenu l’impératif qu’il est aujourd’hui. Quel est le prix de cet objectif d’emploi ? Quels en sont les effets sur la condition de salarié en terme de qualité de l’emploi et de protection sociale ? Quels en sont les effets en termes économiques ? En matière de finances publiques ? Peut-on par ailleurs parler d’une industrie de l’emploi avec l’émergence de secteurs entiers voués à "vendre" de l’emploi ? Enfin, des alternatives au plein-emploi émergent-elles du débat public avec les revendications de réduction du temps de travail, de flexi-sécurité ou de déconnexion plus ou moins radicale du salaire, du travail et de l’emploi ?