La crise que nous traversons n'est pas seulement celle d'un modèle économique - le capitalisme financier néolibéral. Elle est celle d'un système qui désorganise l'ensemble de nos formes d'existence, de nos pratiques et de nos représentations. La "postmodernité", époque marquée par ce que Lyotard appelait la fin des "grands récits", nous confronte ainsi à une situation inédite : le remplacement des anciens dispositifs de contrôle social de type répressif et prohibitif par une forme nouvelle et paradoxale de domination idéologique : la désymbolisation et la désubjectivation, couloirs de l'individualisme consumériste contemporain.
À l'heure de la multiplication des révoltes sociales en Europe et dans le monde, et au moment où la gauche institutionnelle semble avoir définitivement intégré les "lois" du marché mondialisé, se fait jour la nécessité de produire une critique intégrale et renouvelée de la logique néolibérale, en marge de l'expertise subventionnée des économistes d’État et des exhortations de la classe dirigeante à l' "adaptation aux réalités du monde actuel". Pour qu'enfin se réapproprient ceux qui luttent et résistent authentiquement à l'hégémonie capitaliste les instruments intellectuels de sa critique, à savoir les membres du peuple et le parti des gens ordinaires.
Le cycle de conférences est organisé par Charles Robin, et se tient Université Paul Valéry Montpellier III.
L'étude de l'évolution des systèmes techniques nous montre à quel point certaines innovations ont bouleversé la nature même des savoirs et des système sociaux qui s'en étaient accomodés. La révolution numérique fait partie de ces technologies qui transforment le monde dans lequel elles éclosent : une nouvelle épistémè se constitue sous nos yeux.
Comment donc penser l'émergence du web qui rend l’écriture réticulaire accessible à tous ?
Et comment pouvons-nous mettre en œuvre les nouvelles formes d’enseignement, de travail et favoriser les décisions politiques qui nous permettront d'utiliser ce système technique à bon escient ?
La société industrielle a connu jusqu’à présent deux grands modèles organisationnels : le productivisme qui domine le 19e siècle et, au 20e, l’organisation de la production et la stimulation permanente de la consommation par la stimulation et la captation de la libido des individus, destinée à parer à la baisse tendancielle du taux de profit.
Ce dernier modèle, basé sur la prééminence du marketing, s’est effondré à la crise de 2008.
Quelles sont les alternatives ? Comment peut-on parer à l'effondrement complet de notre société ? Peut-on envisager une économie de la contribution ?
Nous vivons dans une société capitaliste dont la caractéristique essentielle est qu’elle constitue une économie libidinale qui vise à capter la libido des individus pour attirer leur investissement sur les objets de la consommation. Dans cette situation, les jeux, notamment les jeux d’argent, sont un cas particulièrement pervers de ce qui est la loi générale du marketing. Cette question se pose aujourd’hui d’une façon gravissime dans la mesure où le capitalisme, en exploitant l’économie libidinale, a fini par la détruire. Cela conduit à la désindividuation des êtres humains, et donc à une forme de contrôle social. L’étude philosophique du pharmakon (à la fois remède et poison) montre que toute société est addictive, qu’il y a de bonnes et de mauvaises addictions, qu’il y a même des addictions nécessaires, et que tout est jeu. Elle ouvre des perspectives philosophico-politiques intéressantes : la nécessité de développer l’individuation des êtres humains, les technologies de l’esprit, une organologie et une sociothérapie.
Séminaire "Trouver de nouvelles armes – Pour une polémologie de l’esprit"
La philosophie de Gilbert Simondon problématise la pensée de l’émancipation politique en mettant au premier plan les conditions techniques de l’action humaine. Il faut, pour que l’homme soit vraiment libre, que le travail asservissant se mue en activité technique.
Ce déplacement de la question de l’aliénation depuis les rapports sociaux du travail vers la technique, conçue comme accès possible à la transindividualité, s’opère à travers une démarcation vis-à-vis de la perspective marxiste (ou repérée comme telle).
L’aliénation technique apparait alors plus profonde et plus objective que l’aliénation strictement économique.
Toutefois, ce geste théorique ne conduit pas tant à une dépolitisation qu’à une nouvelle problématique où il est pris conscience que les machines elles-mêmes sont soumises à une aliénation sociale et où l’invention technique devient une composante indispensable d’un projet conséquent d’émancipation sociale.
Dans ces conditions, il n’est pas inutile d’en revenir à une confrontation constructive de la philosophie des techniques de Gilbert Simondon avec la philosophie économique et politique de Karl Marx.