L'idée de progrès était une idée doublement consolante. D'abord, parce qu'en étayant l'espoir d'une amélioration future de nos conditions de vie, en faisant miroiter loin sur la ligne du temps un monde plus désirable, elle rendait l'histoire humainement supportable. Ensuite, parce qu'elle donnait un sens aux sacrifices qu'elle imposait : au nom d'une certaine idée de l'avenir, le genre humain était sommé de travailler à un progrès dont l'individu ne ferait pas lui-même forcément l'expérience, mais dont ses descendants pourraient profiter.
En somme, croire au progrès, c’était accepter de sacrifier du présent personnel au nom d'une certaine idée, crédible et désirable, du futur collectif. Mais pour qu'un tel sacrifice ait un sens, il faut un rattachement symbolique au monde et à son avenir. Est-ce parce qu'un tel rattachement fait aujourd'hui défaut que le mot progrès disparaît ou se recroqueville derrière le seul concept d'innovation, désormais à l'agenda de toutes les politiques de recherche ? D'où vient que l'avenir a pris la figure de l'ennemi et non plus celle de l'ami ?
Émission "La Conversation scientifique", animée par Etienne Klein.
Composante essentielle de la civilisation occidentale, la rationalité imprègne si bien tous nos modes de pensée que l'on en viendrait presque à oublier qu'elle a une histoire. À l'heure du triomphe de la raison technicienne, François Châtelet nous invite à une passionnante remontée aux sources.
De Socrate à Platon, de Galilée à Machiavel et de Nietzsche à Freud, il retrace "l'invention de la raison", marque les grandes étapes de la pensée philosophique et montre – avec sa simplicité coutumière et un rare talent de conteur – comment se sont tissés d'indissolubles liens entre la liberté et la raison, même si cette dernière, conclut-il, n'a pas encore atteint "l'âge de raison".
Madame H, de l'essai de Régis Debray, n'est autre que l'Histoire avec un grand 'H' : celle qui marque les individus et que les époques culturelles enrichissent ou déforment.
Devons-nous en faire le deuil ? Ou connaissons-nous au contraire une période qui nous y plonge à nouveau ?
Des avis parfois divergents, souvent convergents, avec le philosophe Régis Debray et l'historien Jean-Noël Jeanneney.
Un échange modéré par Gilles Heuré.
C'est en compagnie de nombreux intervenants qu'une généalogie du progrès est entreprise. Comment ce terme est-il passé de concept (avec un sens d'ailleurs fluctuant) à praxis pour en venir à saturer la réalité de notre monde ?
Seule une approche interdisciplinaire jetant des ponts entre des domaines de recherches de prime abord trop éloignés pour être compatibles - physique, économie, écologie, histoire - nous permet de saisir dans sa complexité les enjeux auxquels sont confrontés nos sociétés actuelles vivant par et pour le progrès.
Émission "Histoire vivante", animée par Jean Leclerc.
Peu de sujets de l'actualité contemporaine ne sauraient trouver dans l'oeuvre de Christopher Lasch des explications de fond. Son analyse est d'une puissance critique inégalée parce qu'il évite l'écueil de ceux qui critiquent le capitalisme contemporain tout en présentant ses dégâts comme le prix du progrès matériel et moral.
Chronique de la rencontre programmée entre la fuite en avant du progrès, c'est-à-dire la destruction méthodique au nom du principe de plaisir de tous les piliers de l'ordre bourgeois et la rationalisation de tous les aspects de la vie par la dynamique du capitalisme, la critique du progrès de Lasch est fondée sur l'étude de la personnalité dominante produite par le capitalisme avancé : Narcisse ou le moi minimal.
Au travers des grands thèmes qui traversent la pensée de Lasch, Renaud Beauchard présente un panorama des diagnostics de Lasch sur son temps et sur la catastrophe anthropologique du capitalisme de consommation.
Il expose aussi la philosophie de l'espérance que Lasch a articulée au travers de l'exploration d'une tradition civique américaine dont la redécouverte offre des pistes au monde entier afin de faire en sorte que la volonté de construire une société meilleure demeure vivace sur les décombres encore fumants de la social-démocratie.
Émission "Les lundis du Bien commun", animée par Antoine Garapon.
C'est dans les situations de chaos collectif que le besoin de penseurs calmes et rationnels se fait le plus sentir. Le problème est que c'est dans ces moments-là qu'ils se font le plus rare. Le problème en d'autres termes, c'est que la raison a besoin de la raison pour penser. Quand le monde devient fou, les tenants de la raison, les Intellectuels sont souvent les premiers à entrer dans la danse.
L'ouverture du procès des attentats de Janvier 2015 à rouvert à gauche les débats autour des caricatures et de la délicate balance entre liberté d'expression et ce que tout le monde appelle le "respect" que l'on dit dû aux minorités ; minorités qui deviennent si nombreuses avec le temps que l'on risque de se trouver vite dans la situation qui prédomine aux Etats-Unis où il devient impossible de ne pas offenser quelqu'un sitôt que l'on prend la parole.
Ce débat sur l'actualité en cache un autre, plus profond. Selon un courant de pensée de plus en plus puissant des deux côtés de l'Atlantique, c’est la philosophie occidentale des Lumières, qui permettait croyait-on la libre expression de chacun, qui serait en fait l'ultime responsable des dérives de cette même liberté. Sous couvert de liberté et d'universalisme, les Lumières auraient permis l'esclavage, la colonisation, le racisme, le capitalisme mondial et même Hitler. Etre vraiment de gauche aujourd'hui se serait donc déboulonner les statues de Voltaire et Montesquieu en plus de celles des grands navigateurs et commerçants...
Émission "Signes des temps", animée par Marc Weitzmann.
Pourquoi un mythe antique, raconté par Hésiode et transformé par Eschyle, a-t-il été, aux XIXe et au XXe siècle, réinterprété par les romantiques, les socialistes, Karl Marx, les nazis et les régimes communistes ? En quoi l'idéal du voleur de feu a-t-il justifié l'individualisme naissant, le culte du progrès et la sortie de la religion ?
Émission "La Fabrique de l'Histoire", animée par Emmanuel Laurentin et Victor Macé de Lépinay.
Alors que la prochaine élection présidentielle se profile, il peut être important de de prendre le temps de la réflexion en revenant sur la bipolarisation de notre vie politique française. Démarche étrange alors que parallèlement, cette scène politique semble plus que jamais éclatée voire émiettée en diverses tendances dont nous serions bien en peine d'en qualifier les subtilités intellectuelles derrière les ambitions personnelles.
De quoi la droite est-elle le nom ? La question peut surprendre, pourtant elle est essentielle alors que, depuis dix ans maintenant, la population française se tourne vers ses idées et sa culture. Comme si nous vivions une sorte de Mai 68 à rebours dont les valeurs de La manif pour tous ont été par opposition un des symboles fort du quinquennat de François Hollande. De quoi la droite est elle le nom, c’est sortir de la politique politicienne et prendre un peu de hauteur non seulement en s'aventurant dans la pensée, la philosophie politique mais aussi en voyageant dans notre histoire de la plus ancienne à la plus récente.
De quoi la gauche est-elle le nom ? La gauche comme chacun sait est née sous la révolution française en septembre 1789, au moment du vote de l'assemblée à propos du veto du roi : ceux qui étaient pour un veto absolu se sont placés à droite du président, ceux qui étaient en faveur d'un veto suspensif se sont placés à sa gauche. Nous n'allons cependant pas revenir aussi loin dans le temps mais porter un regard sur la gauche des XXe et XXIe siècles. Quels sont les thèmes qui ont structurés son identité ? Ces thèmes ont-ils évolué et se sont-ils érodés ? Quel impact cette érosion a eu sur la pensée politique ? Quelle est la place enfin de la gauche aujourd'hui dans le débat des idées politiques ?
Une émission animée par Christophe Dickès.