Une discussion avec Francis Cousin où les thèmes suivants sont abordés au prisme de la philosophie insurrectionnelle de la communauté de l'être : le sacral, la religion, la Vérité, le Christ radical, le communisme primitif/supérieur, la colonisation, traduire et interpréter les Évangiles, le combat pour l'émancipation humaine, l'écologie et l'homosexualité.
Les deux philosophes George Steiner et Pierre Boutang parlent dans un premièr temps du mythe d'Antigone, de son origine, de ses répercussions dans l'histoire et de ses résurgences dans la politique. Chacun selon sa propre sensibilité, juive ou chrétienne, s'exprime à propos de ce mythe qui pose de façon permanente le conflit de la conscience humaine et de la raison d'Etat.
Lors de leur second échange, ils reviennent sur un fait biblique célèbre : le sacrifice d'Abraham. Ce fait biblique n'est en fait que prétexte à réflexion sur les conceptions différentes voir opposées de la notion du mal dans la religion juive et dans la religion catholique. Réflexion vite transposée dans notre monde contemporain ou le mal s'illustra dans l'holocauste.
Un débat animé et plein d'intelligence.
Dans le cadre de l'Université de Printemps de la bibliothèque de Viroflay, Françoise Bonardel s'exprime sur trois sujets différents :
1. Identité
L'identité enferme-t-elle les individus et les peuples dans une image figée d’eux-mêmes, ou est-elle l’expression d’une liberté à laquelle ils ne sauraient renoncer ? Celle d’être soi, parmi d’autres êtres humains tout aussi soucieux de se situer par rapport à leur héritage culturel, leurs aspirations personnelles et les contraintes propres à chaque société.
Aussi faut-il distinguer les crispations identitaires rendant impossible une vie commune, et le désir légitime de s’affirmer dans sa singularité. Loin d’être un obstacle à la reconnaissance d’autrui comme on le pense communément, l’identité remplit un triple rôle : renforcer le rapport naturel que chaque individu entretient avec lui-même, et qui fonde sa responsabilité ; offrir au monde extérieur certains signes de reconnaissance à peu près stables permettant la vie en société ; rendre possible la transmission, de génération en génération, des acquis individuels et collectifs, autant dire de la culture.
2. Culture
Entre culture et identité le lien est en effet très fort, du moins jusqu’à ce que la "culture de masse" s’emploie à dissoudre l’une et l’autre au nom d’un égalitarisme mal compris, et d’une globalisation d’ordre commercial. Si le "droit" à la culture est aujourd’hui un impératif moral et sociétal, encore faut-il savoir quelle sorte de culture va pouvoir assurer la formation des individus tout en développant le lien social.
Si l’on parle depuis quelques décennies de "crise de la culture", en Europe occidentale tout au moins, c’est que ces deux fonctions se trouvent souvent dissociées, quand elles n’entrent pas en conflit au lieu de s’épauler. C’est pourtant à ce double souci –du monde et de soi– que la culture devrait aujourd’hui encore répondre, de manière à associer l’idéal d’excellence qui nous a été transmis par des siècles de grande culture, et le respect des principes démocratiques auxquels les sociétés postmodernes sont attachées.
3. Sagesse
Qu’il s’agisse d’identité ou de culture, la sagesse n’est-elle pas d’abord la recherche d’un équilibre, et la découverte du sens de la mesure qui fait si cruellement défaut aux sociétés postmodernes ?
Au regard de l’idéal de sagesse cultivé par les philosophes grecs, ces sociétés sont en effet la proie d’une démesure menaçant directement leur survie à long terme. Que devrions-nous donc entendre des mises en garde énoncées par les Anciens ?
Si la sagesse est pour une part la disposition d’esprit permettant d’éviter le pire, elle est aussi ce qui offre à chaque vie un horizon moins limité que celui du monde humain. C’est pourquoi l’amour de la sagesse –autant dire la philosophie– donne aussi à l’âme humaine l’audace de s’aventurer dans des territoires où elle est susceptible de découvrir le sens ultime de son destin. N’est-ce pas ce lien, entre sagesse et sens du sacré, que nous aurions besoin de redécouvrir ?
Nicolas Tertulian a abordé à plusieurs reprises le sujet d'une confrontation entre les pensées de Heidegger et de Lukacs. Il est parti de l'idée qu'il existe des motifs communs entre les deux pensées, par exemple le thème de l'aliénation et celui de la réification.
Cette conférence poursuit un objectif plus ambitieux, car il se propose de remonter aux fondements ontologiques des deux pensées et confronter Heidegger et Lukacs à partir de leur opposition sur pluseurs questions philosophiques cruciales : l'autonomie ontologique du monde extérieur, la définition du concept de "monde", la "subjectivité du sujet" et la humanitas de l'homo humanus, la critique lukacsienne du concept heideggérien d' "être-jeté..." (Geworfenheit), la problématique de la finitude et de l'infini, etc.
La thèse centrale est l'occultation par Heidegger du travail comme "phénomène originaire" de l'existence humaine et sa substitution par une catégorie affective : le "Souci" (die Sorge), tandis que Lukacs a construit son ontologie de l'être social, en suivant Hegel et Marx, sur l'idée du travail comme pivot de l'existence humaine.
Enfin, il désigne plusieurs motifs de la pensée heideggérienne (la critique de la pensée sécurisante, par ex.) qui préfigurent l'adhésion du philosophe à l'extrême-droite de l'époque, ce qui confirme la thèse de Lukacs formulée dans son livre La Destruction de la Raison sur le caractère "pré-fasciste" de certaines orientations de la philosophie heideggérienne à l'époque qui a succédé à son livre fameux Être et Temps.
Ce premier entretien du Cercle Kritik est mené avec Francis Cousin, qui nous fait le plaisir d'exposer en détails la pensée de Marx et du marxisme.
Au programme : la pertinence du distinguo "jeune Marx" - "vieux Marx", la logique du Capital, la social-démocratie, le structuralisme, Louis Althusser et le Freudo-Marxisme...
Les pendules pseudo/post/para/-marxistes vont être remises à l'heure !
Peut-on mélanger l'anarchisme et le conservatisme ? Cette position politique inclassable est-elle cohérente ?
Dans la lignée des penseurs George Orwell et Jean-Claude Michéa, Charles Robin nous invite à considérer les enjeux philosophico-politiques de notre époque et à nous positionner face à la nouvelle forme d'oppression totalitaire du capitalisme.
En effet : on peut être à la fois un défenseur intransigeant de l'égalité sans souscrire aux illusions "progressistes" et "modernistes" au nom desquelles s'accomplit désormais la destruction du monde. En établissant la cohérence réelle de cette pensée apparemment paradoxale, Charles Robin met en évidence quelques-unes des conditions de cette indispensable critique moderne de la modernité.
Bourdieu aurait sûrement dérangé un peu moins son époque s'il s'était contenté d'assumer le rôle qui est prévu pour les gens comme lui : celui de l'homme de science - détenteur d'un savoir qui était, dans son cas, énorme et parfois écrasant -, que la position d'exception qu'il occupe protège contre le contact avec les réalités et les modes de pensée "vulgaires".
Mais il ne l'a justement pas voulu et il est curieux qu'on lui ait reproché, parce qu'il était un des intellectuels les plus prestigieux et, du point de vue social, les plus privilégiés de notre temps, d'avoir réussi à rester en même temps aussi proche des gens les plus ordinaires.
C'est justement, en grande partie, à cause de leur réaction commune sur la façon dont la raison savante devrait traiter le "sens commun" et les "gens du commun" que Jacques Bouveresse et Pierre Bourdieu ont sympathisé spontanément depuis le début.
Bourdieu a dit qu'il ne s'était "jamais vraiment senti justifié d'exister en tant qu'intellectuel". Et, à la différence de beaucoup d'autres, il n'a pas seulement essayé, mais également réussi à exister autrement....
Emission "Les chemins de la connaissance", animée par Jacques Munier.