Comme Louis-Ferdinand Céline, Erza Pound a connu la gloire et l'opprobre. Sa vie et son œuvre posent à l'esprit humain une question insoluble, une insupportable énigme : comment peut-on être en même temps écrivain de génie - le plus grand poète américain du siècle - et chantre de l'idéologie fasciste, ennemi irréductible de la démocratie ?
Au départ, il sollicite le dépaysement ; enfant du vieil Ouest, il laisse derrière lui l'Amérique, quitte en 1907 la morne société victorienne pour l'Europe où il décide de vivre. Londres, Paris, Venise...
Traducteur, poète, critique, Erza Pound est capable d'avoir une idée par seconde et fonde une demi douzaine de mouvements littéraires. Compositeur, éditeur, plus généreux que marmoréen, il "épaule" James Joyce dans la recherche, dans la continuation d' "Ulysse"... Point d'effusions diffuses ou d'épanchements, le poète n'écrit pas en son nom puisque sa création englobe tout l'héritage culturel.
Ezra Pound entreprend les Cantos, un "livre des morts" ou une "descente aux Enfers", qui établit un dialogue avec les textes célèbres de la culture Européenne puis chinoise ... Et visite les traductions inconnues et convoque les maîtres relégués dans l'ombre, oubliés ou négligés.
Défenseur érudit de la tradition artistique et promoteur de formes nouvelles, Ezra Pound procède par conversation fragmentaire, fusion de personnages, montage de citations, d'événements spirituels et de faits divers de l'époque, compression de l'Histoire...
Contempleur acharné de l'usure et de la décadence des Etats-Unis, il se livre pendant la Seconde guerre mondiale à des causeries véhémentes et violemment anti-américaines, à la radio romaine, et en faveur de Mussolini, se prononce contre l'intervention US traître à l'Amérique. Dès que les Américains débarquent, il est enfermé par les forces militaires dans une cage de fer, ramené et interné à Washington.
L'homme déchu est primé et célébré en 1948, "grand poète américain", les Cantos sont salués comme "la grande épopée de notre temps et de l'homme moderne".
Au terme de sa vie, Ezra Pound se plaît à dire qu'il a été le dernier Américain a avoir vécu la tragédie de l'Europe ou encore "une fourmi qui aurait échappé au naufrage de l'Europe".
Émission "Une Vie, une Œuvre", produite par Pascale Charpentier.
Avec 2084 : la fin du monde, Boualem Sansal, voix majeure de la littérature contemporaine, enfonce sa plume dans une plaie ouverte. Dans la filiation d'Orwell, il met en scène une société fondée sur la soumission à un régime totalitaire, et dénonce le radicalisme religieux.
C'est à l'occasion de la parution de ce livre en néerlandais qu'il est accueilli pour un entretien entrecoupé de lectures.
L'opportunité d'entendre les mots de Boualem Sansal, lus par Audrey D’Hulstère, et puis sa propre voix, un an après la parution originale du livre.
Octave Mirbeau (1848-1917) fut, de son vivant, un homme adulé et redouté. Ecrivain, auteur dramatique, polémiste, militant libertaire, etc., Sartre disait de lui dans Les Mains sales : "Il est irrécupérable".
C'est l'auteur du Journal d'une femme de chambre, Les Affaires sont les affaires, etc. Il fut au côté de Zola lors de l'affaire Dreyfus, d'Oscar Wilde quand il fut persécuté pour son homosexualité, etc. Son style, sa plume... étaient brillantissimes.
Signe des temps en cette époque où le signe est roi, il éclot de nouveau de mille roses. Alain (Georges) Leduc, de la société Octave Mirbeau, nous fait revivre l'histoire de ce gentleman vitrioleur. Époustouflant !
Ces "pages arrachées" au Voyage au bout de la nuit ont été composées par l’écrivain Philippe Muray en 1986.
Durant plusieurs semaines, il a invité des comédiens mais aussi des écrivains à livrer aux auditeurs de larges extraits du roman le plus célèbre de Louis-Ferdinand Céline.
Dans cette émission, les épisodes 1 et 4 de cette série sont retransmis, tous deux lus par Michel Piccoli.
Alfred Eibel a fréquenté Fritz Lang durant de nombreuses années, vu et revu la plupart de ses films.
Gardant son enthousiasme intact pour se grand réalisateur, il nous fait part de ses réflexions et met en lumière les rapports souterrains entre la vie de Fritz Lang et les personnages de ses films.
Il entend bien nous montrer que cet homme n'a pas cédé un pouce en rapport avec ce qu'il voulait exprimer : il s'est souvent accommodé de budgets dérisoirs en en tirant le meilleur parti possible, restant lui-même.
Ce fut à la fois sa force et son anémie.
L'écrivain Maurice Genevoix, en compagnie de Jacques Chancel, revient sur sa trajectoire personnelle, depuis son enfant jusqu'à son élection à l'Académie française en passant par ses souvenirs d'ancien combattant de la première guerre mondiale.
Il évoque également son goût pour la nature et son amour pour les animaux alors que son ouvrage Tendre bestiaire vient d'être publié.
Enfin, c'est de son attachement à la langue française, des romanciers qu'il admire, de ses filles et de son rôle de père dont il parle.
Les pamphlets céliniens ne se limitent pas à trois titres que l'on a isolés abusivement pour mettre en relief certains vecteurs anti-juifs, et condamner ainsi l'auteur.
En effet, la polémique célinienne vise essentiellemenet un enjeu esthétique : la liberté de l'intuition poétique en dehors de toute idéologie.
Céline n'a pas été seul dans ce combat : Chênier, Zola, Vallès, Artaud, Robin accompagnent le poète.
L'idéologie correspondait pour le poète Céline et pour le docteur Destouches à une grille canalisant pensée et sensibilité, et s'opposant, par conséquent, au mouvement de la vie et de la création poétique.
Céline s'est toujours battu contre la mort biologique, comme il l'annonçait dans son premier pamphlet Semmelweis. Il s'est toujours efforcé de maintenir une intuition poétique libre contre la mort psychique des iédologies.
C'est ce que Nicole Debrie tente de montrer à la lumière des oeuvres de Claude Bernard et d'Emile Zola, et par une lecture attentive des huit pamphlets céliniens : Semmelweis, Hommage à Zola, Mea Culpa, Bagatelles pour un massacre, l'Ecole des cadavres, les Beaux Draps, l'Agité du bocal et les Entretiens avec le professeur Y.
Pol Vandromme l'appelait le "nomade sédentaire". Car ce grand voyageur nous a donné le goût de la Grèce autant que de la France royale à laquelle il était resté fidèle. Ce lecteur subtil et fin incarnait à merveille l’idée la plus haute que l’on puisse se faire de la droite littéraire, par excellence buissonnière et légendaire.
Il avait de l’élégance et du style ; il était seul et entouré d’amis morts ou vivants ; il était libre voyageur et enraciné ; il se défiait des idées mais il aimait la vie vivante, celle que les paysages embellissent et que l’on accepte avec toutes ses contradictions sans jamais chercher à les dépasser.
Avec Morand, Chardonne, André Fraigneau, Nimier, Blondin, Jacques Laurent, François Sentein ou Michel Mohrt, il compte désormais parmi la phalange des singuliers, navigateurs hauturiers et mainteneurs, gardiens de la beauté des phrases.
Émission "Français mon beau souci", animée par Michel Mourlet.