Illustré par des vers du poète grec Constantin Cavafy, En attendant les barbares, Jure George Vujic entame sa réflexion par un constat terrible : les barbares, que la Rome décadente attendait comme une forme de délivrance, qui étaient "une sorte de solution", ne viendront pas car ils sont déjà là, "établis et bien présents dans toutes les structures de la société dite civile, dans les médias, dans les institutions politiques et culturelles".
Le constat est pire encore : les barbares sont en nous, il ont "colonisé le mental, l’imaginaire individuel et collectif européen". Ils ont été "une sorte de solution" aux différentes crises, culturelles, idéologiques et surtout économiques que le siècle passé a traversées.
Mais cette "solution" s’est faite contre les peuples, contre leurs identités profondes, contre leurs âmes, en brisant les liens qui les enracinaient dans une histoire, dans une religion, dans une culture.
Et c’est précisément parce que nous sommes devenus ces barbares que la refondation de la société ne pourra se faire que par une refondation de l’esprit, au travers d’une contre-culture authentiquement résistante, antithèse de la culture dominante prétendument émancipatrice, mais en réalité mortifère et au service du marché, et qui, sous couvert de libération, détruit toutes les valeurs qui ont forgé l’ossature de l’humanité.
Depuis les élans du Romantisme jusqu'au renouveau de la littérature dialectale, en passant par les grandes fêtes du Millénaire de 1911, ils furent nombreux les poètes normands qui célébrèrent les Vikings et ces "drakkars" qu'il conviendrait, à en croire les savants, de renommer snekkars ou esnèques.
De leurs vers, écrits dans le style d'une époque littéraire aux reflets d'incendies, devait naître ce que l'on a appelé "le mythe nordique", c'est-à-dire non pas une fantasmagorie, mais la prise de conscience d'une réalité identitaire, originale entre toutes.
Jean Mabire nous conte la naissance de ce mythe recent et dresse le portrait de plusieurs des écrivains qui y ont contribué. On peut entendre, au loin, le fracas des épées, le tumulte des vagues, l'appel des Walkyries et ce chant profond venu du Nord sur "la route des cygnes".
Les paroles du dieu Odin rassemblent-elles encore le peuple vivant sur cette terre normande, dont le premier duc Rolf le Marcheur, dit Rollon, avait affirmé à ses compagnons scandinaves, Norvégiens et Danois : "Nous en resterons maîtres et seigneurs" ?
Depuis 40 ans, l'identité est au cœur du travail de réflexion du mouvement dit de la "Nouvelle Droite". Un travail idéologique salué par Michel Onfray, Eric Zemmour ou plus récemment… Jean-Christophe Cambadélis, le premier secrétaire du parti socialiste a avoué : "aujourd'hui l'idéologie dominante n'est pas celle de la gauche mais celle –les spécialistes me comprendront– de la Nouvelle Droite, celle de l'identité avant l'égalité."
Une analyse sommaire qui mérite des explications, explications qui nous sont ici fournies par Alain de Benoist et Thibault Isabel.
Alain de Benoist nous rappelle en préambule que l’identité ne se pose comme problème qu’au moment où elle ne va plus de soi, et souligne les différentes dimensions de l’identité : multidimensionnelle (car associant des composantes héritées et choisies), dialogique (on ne se constitue que par rapport à autrui), variable et dynamique au cours de la vie de l’individu ou de de la communauté.
En matière de menace sur les identités collectives, Alain de Benoist ne pense pas que notre identité soit d’abord menacée par l’identité des autres, même si une telle menace peut exister : le danger le plus grand est "le système à tuer les peuples", l’imposition d’une homogénéisation planétaire, l’offensive de "l’idéologie du Même". Le capitalisme comme "fait social total" (M. Mauss) s’est avéré le système le plus efficace pour effacer les frontières et les identités. Celles-ci seront menacées tant que l’on ne remettra pas en question les manières de vivre inhérentes à ce système.
Thibault Isabel, quant à lui, lie les revendications identitaires à une évolution anthropologique amorcée réellement à la fin du XVIIIe siècle : l’essor de l’idéal d’authenticité. L’homme est devenu un individu parce qu’il ne veut être rien d’autre que lui-même. À la différence des sociétés traditionnelles, les choix de vie qui s’offrent à l’individu à l’époque moderne sont incommensurables, rendant la question de notre identité plus problématique.
Si se distinguer des autres apparaît comme le seul moyen d’exister, l’anonymat qui prévaut dans le monde contemporain ne fait qu’exacerber ce besoin de reconnaissance. En outre, le désir d’être individuellement soi-même n’exclut pas le besoin d’appartenir à un groupe homogène qui ne ressemble lui non plus à aucun autre : le nationalisme n’est, à cet égard, rien d’autre qu’un individualisme à l’échelle de la nation. De l’anonymat, naissent ainsi les pathologies de l’identité, poussées de revendications qui peuvent être tragiques.
L'identité "saine" au contraire est celle qui respecte à la fois l’individu et la communauté, et qui ne rejette pas l’autre, mais au contraire l’intègre.
Qu'avons-nous fait de la "libération sexuelle" ? Quelle est cette liberté qui condamne à choisir en permanence son identité, ses amours, ses pratiques comme n'importe quel produit de consommation ? Et quelles sont les nouvelles contraintes qui en ont émergé ?
Les trois intervenants s'interrogent face aux évolutions des comportements de toutes les classes d'âges devant les injonctions de notre société, notamment les codes transmis par la pornographie.
Si la crise qui frappe le monde entier est certes une crise bancaire et financière, c'est d'abord la première crise de l'unification planétaire, affirme Hervé Juvin, qui cherche à montrer les logiques, les intérêts et les passions à l'œuvre derrière le désordre des systèmes, des actions et des comportements.
Le système occidental dominait le monde, mais c'en est fini. Il n'a plus le monopole du bien ni des certitudes. Nous vivons le renversement du monde.
Cette crise le rend sensible avec acuité, si elle n'en est pas la cause : elle révèle que l'économie ne peut constituer le fondement, hors marché, des sociétés.
Impossible de comprendre aujourd’hui les logiques de guerre qui déchirent le Proche et le Moyen-Orient sans faire un sort, au préalable, à la thèse débilitante du "choc des civilisations" et aux slogans de la lutte contre le "terrorisme transnational islamiste".
C’est à cette tâche que s’attelle Georges Corm en analysant d’abord les mécanismes qui ont permis, depuis les années 90, de paralyser les oppositions aux guerres injustes, en dénonçant ensuite sans relâche l’instrumentalisation de prétendues valeurs politico-religieuses tout comme la relation perverse entre les intérêts géo-politiques de certains Etats et leur prétention à défendre dans l’ordre international des idéaux religieux.
En récusant enfin, du côté des pays "occidentaux", l’application scandaleusement sélective du droit international aux situations conflictuelles.
L’accent est ainsi mis non seulement sur la possibilité d’une lecture profane des conflits mais sur la nécessité d’une conception résolument universaliste de la laïcité.
Une conférence conduite par Alain Lhomme et Gérard Engrand.
Michel Drac, essayiste et co-fondateur de la maison d'édition Retour aux Sources et du site Scriptoblog, nous livre une analyse fine des rapports de forces politiques et géopolitiques actuels.
1e partie :
00:00 : Présentation de Michel Drac
03:00 : De l’articulation entre identité, citoyenneté, patriotisme, universalisme ; cartographie de la France identitaire ; Identité culturelle vs identité biologique ; Mouvances identitaires européennes
15:10 : Des migrants, du risque de dislocation de l’UE et de redéfinition des rapports avec Moscou
24:00 : Du danger de l’alliance germano-russe de la perspective américaine
29:15 : De la sociologie électorale française et de la probabilité de basculement vers un gouvernement de rupture
43:45 : Du retour à la souveraineté nationale française et de l’intégration à un ordre international en cas d’implosion de l’UE, chaine de l’impérialisme américain en Europe
54:20 : Du Brexit et du risque d’éclatement de l’UE
2e partie :
00:00 : De la Grèce et de la tactique de Tsipras ; Du prolétariat ; De la tactique de Poutine ; De la sortie de l’euro de la Grèce
17:15 : De la nécessité d’une refondation du système monétaire international et d’une nouvelle heure zéro, de la condamnation inéluctable de l’euro
28:50 : Du cas Berlusconi
30:50 : Du cas de l’Espagne et de podemos, de la gauche radicale et du souverainisme
37:00 : Du positionnement géographique de la France en Europe et conséquences, du jeu américain
41:00 : Du clivage gauche/droite
3e partie (questions-réponses) :
00:00 : Pouvez-vous nous parler de la dissidence française et de la stratégie de contre société fractionnaire ?
12:40 : Le FN est-il là pour interdire toute possibilité d’accès au pouvoir des idées nationales puisqu’il n’a finalement aucune chance de gagner dans un second tour d’élections présidentielles ?
25:11 : Que pensez-vous du fait religieux en France ?
28:20 : Quel est votre point de vue sur la remigration ? Comment verriez-vous l’application d’un tel concept dans la réalité ?
33:35 : Pensez-vous que les prévisions d’effondrement total et brutal de Piero San Giorgio sont réalistes ? Au sujet de la fin du pétrole, ne pensez vous pas que les alternatives existent mais ne sont pas mises en avant car pas encore rentables ?
40:17 : Que pensez-vous de la vidéo d' Alexandre Douguine qui affirme que la Russie devrait annexer l’Europe par la force ?
42:05 : Que pensez-vous de la situation en Syrie avec la Turquie et l’Arabie Saoudite qui menace d’intervenir sur le territoire Syrien ?
48:55 : Récemment, Daech a menacé la France dans une vidéo et nous a montré une photo de Marine Le Pen, que se passerait-il si un attentat était commis contre MLP ?
49:48 : Le modèle de société que vous présentez où les citoyens s’organisent ressemble beaucoup à ce que les économistes mettent en place en ce moment aux USA avec l’ubérisation et l’économie collaborative. Ce modèle de société que vous proposez ne va-t-il pas dans le sens de ce que le système veut ?
51:36 : Que pensez-vous de la situation géopolitique au moyen Orient ou quasiment toutes les grandes puissances sont sur le terrain, n’y voyez vous pas le prélude à une guerre mondiale ?
51:55 : Maintenir la masse dans l’idée que l’autonomie nationale agricole, financière etc est une utopie dans ce mode globalisé et modernisé n’est-il pas la seule solution que nos dirigeants promulgueraient afin de nous maintenir dans le mutisme et l’immobilisme afin de contenir un mouvement social d’ampleur prônant et souhaitant un réel changement de paradigme ?