Il est courant de déplorer le déclin de la souveraineté de l'État-nation, qui semble devoir être aujourd'hui supplantée par la puissance du capital mondial. Restaurer la verticalité de l'État et son autorité serait ainsi la seule voie pour contester le globalisme néolibéral. C'est contre cette illusion, encore trop répandue à gauche, que Pierre Dardot nous introduit aux travaux qu'il a mené avec Christian Laval sur l'histoire complexe et singulière de l'État occidental moderne, depuis sa naissance à partir du modèle de l'Église médiévale jusqu'à son rôle actuel d'État-stratège dans la concurrence mondiale.
Comprendre les aléas et les détours de cette construction, c'est mettre à nu les ressorts d'une domination sur la société et sur chacun de ses membres qui est fondamentalement de l'ordre de la croyance : les "mystères de l'État", le culte de sa continuité qui oblige ses représentants par-delà leur succession, la sacralité dont ces derniers aiment à s'entourer dans l'exercice de leurs fonctions, autant d'éléments qui ont pu changer de forme, mais qui demeurent au principe de sa puissance. En retraçant cette généalogie, il s'agit pour Pierre Dardot de montrer que l'on ne peut répondre aux défis de la mondialisation capitaliste et du changement climatique sans remettre en cause cet héritage. Car l'invocation de la souveraineté "nationale" est devenue l'alibi de l'inaction climatique et de la perpétration des écocides.
Pour affronter ces enjeux globaux, il est indispensable de s'attaquer à un tel régime d'irresponsabilité politique qui dispense les gouvernants de rendre des comptes aux citoyens. C'est dire qu'il faut ouvrir la voie à un au-delà de la souveraineté étatique.
La démocratie, entendue dans son sens étymologique comme pouvoir du peuple, a vu son sens et sa pratique déformés -voire dévoyés- depuis quelques siècles.
Certains auteurs, militants, mouvements sociaux et expériences politiques concrètes se sont donnés pour but de "démocratiser la démocratie". Afin d'y parvenir, certains ont par exemple essayé de rendre la décision politique juste et légitime en la faisant découler d'une délibération entre les citoyens, d'autres ont proposés comme alternative le conseillisme qui s'oppose aux partis et aux syndicats quand les néo-républicains évoquent la démocratie agonistique.
Karim Piriou revient sur une histoire mouvementée et sur ces théories prometteuses qui, si elles entendent toutes revivifier la démocratie, n'en posent pas moins certains problèmes qu'il est important de soulever et de comprendre.
Alors que le gouvernement suisse a déclaré la situation sanitaire actuelle comme "extraordinaire" au sens de la loi sur les épidémies, il s'est accordé les pleins pouvoirs dans la gestion de la pandémie de Covid-19. Dans ce contexte d'exception, comment peut-on encore défendre la démocratie ? Et d'ailleurs, a-t-elle encore quelque chose à dire ?
Auteur de travaux sur la question de la temporalité démocratique et sur la démocratie direct, Antoine Chollet est chercheur et professeur de sciences politiques. Il travaille notamment sur les théories de la démocratie, sur la pensée politique contemporaine ainsi que sur le nationalisme, en particulier dans sa variante suisse.
La Révolution française est un événement d'importance universelle et un extraordinaire creuset d'idées nouvelles qui a jeté les bases des grands courants politiques français contemporains.
Qui sont les ancêtres des Républicains de droite, des socialistes, des Insoumis ? Comment sont nées leurs idées et qu'ont-ils laissé en héritage aux générations militantes contemporaines ?
Afin de répondre à ces questions, c'est Stéphanie Roza, chercheur au CNRS s'intéressant particulièrement aux théories philosophiques et politiques des acteurs de la Révolution, qui nous partage ses connaissances.
Au lendemain d'une soirée d'éducation populaire en compagnie de France Lepage, Etienne Chouard revient sur ses sujets de prédilection et nous expose son opinion sur de nombreux sujets tels que la constitution et le processus constituant, la différence entre l'élection et la votation, le clivage gauche/droite on encore les attaques qu'il subit quant à sa liberté de parole.
Une intervention qui s'intègre plus largement dans le grand projet de refondation démocratique pour lequel se bat Etienne Chouard depuis de nombreuses années.
Dans cette échange avec le philosophe Jacques Rancière, on parle de peuple, de démocratie, de représentation, d'état de droit. Mais on parle surtout du temps dans lequel il y a du sens à parler de tout cela. Un temps auquel l'Histoire n'a fait aucune promesse ni le passé légué aucune leçon – seulement des moments à prolonger, aussi loin qu'on le peut.
En politique, quoi qu'en disent les gens graves, il n'y a que des présents. C’est à chaque instant que se renouvellent les liens de la servitude inégalitaire ou que s'inventent les chemins de l'émancipation.
Émission "Interdit d'interdire", animée par Frédéric Taddeï.
Plus que jamais, l'actualité mondiale ou nationale met en question le pouvoir du peuple. Là il se révolte avec fracas. Ici on le voit voter contre les autorités en place. Pour les uns il reconquiert sa liberté. Pour les autres il est aveugle et crée le désordre.
Antoine Chollet nous offre une réflexion sur le pouvoir en examant les fondamentaux. Comment comprendre et articuler la liberté, l'égalité, la responsabilité, l'opposition entre une élite dite éclairée et les masses ?
En Suisse, quels sont les atouts exceptionnels, les dérives ou les illusions de la démocratie directe ? Mal comprise, elle est souvent confondue avec les libertés communales du Moyen Age. Ou admise avec des réserves suspectes.
Antoine Chollet, secondé et interrogé par Marie-Claire Caloz-Tschopp et Andreas Gross, en appelle à plus de rigueur et, fort de ses convictions, conclut par des appréciations sévères sur la politique suisse. Il décèle dans ses élites des tendances clairement antidémocratiques. Et inversement, il expose les raisons d'une confiance renforcée en l'institution même de la démocratie directe.
Depuis les années 1970, l'œuvre de Cornélius Castoriadis apparaît de plus en plus comme une référence majeure pour tous ceux qui s'efforcent d'analyser la dynamique des sociétés contemporaines, d'élucider le sens du projet démocratique, ou de mettre en lumière les conditions auxquelles on peut penser l'histoire et la liberté.
Ce colloque a pour but de montrer et de discuter les principaux apports de cette pensée exigeante à la philosophie et à la théorie politique, mais aussi à la compréhension du présent et à l'épistémologie du savoir contemporain.
Cinq thèmes ont été retenus qui donnent lieu à des exposés et à des débats entre Cornélius Castoriadis et des intellectuels de divers pays :
- ontologie et épistémologie
- la théorie de la démocratie et l'expérience grecque
- le social-historique et l'imaginaire social des sociétés modernes
- les conflits politiques et les perspectives contemporaines
- l'inconscient et la psychanalyse