Les années passent et le bouleversement des paysages électoraux continue, sans parler de l'éclosion de mouvement sociaux comme les Gilets Jaunes. Les populistes sont de plus en plus nombreux dans la contestation et proches du pouvoir dans de nombreux pays d'Europe.
Comment comprendre cette vague de fond politique qui déferle sur nos vieux pays sous-industrialisés ? La grille de lecture économiciste est-elle suffisante ? Faut-il intégrer la variable de l'insécurité culturelle ? Et comment les partis politiques s'adaptent-ils à cette nouvelle donne ?
Une conférence animée par Marion Maréchal-Le Pen.
Depuis les années 1990, nous vivons une transformation sociale sans précédente. Le glissement progressif vers le modèle libéral mondialisé a transformé les structures de l'économie et les équilibres sociaux. Cela a eu une répercutions directe sur l'environnement syndical ; la baisse régulière des effectifs des grandes centrales et de la participation aux élections professionnelles donne une idée du naufrage.
Avec un des taux de syndicalisation les plus bas d'Europe, les syndicats français ne représentent plus une large majorité de travailleurs précaires et en voie "d'uberisation". Le gros des bataillons se regroupant dans le public ou les grandes entreprises, on ne les retrouve pas forcément sur les terrains sociaux chauds.
Les directions syndicales ont compris cette faiblesse et cherchent désormais à maintenir leur rôle de "partenaires sociaux représentatifs". Le repli sur la cogestion des organismes de la protection sociale garantie par le système paritaire (État, patronats et syndicats étant représentés dans la direction des principales administrations de l'aide sociale) est pour eux le moyen de conserver cette armada de "permanents" et de "détachés" qui offrent des troupes mobilisables alors que les effectifs décroissent.
La "base" des principaux syndicats, elle, doit faire face à une situation paradoxale dans la plupart des récents conflits. Alors que la combativité des travailleurs est forte, elle doit convaincre les directions de la suivre et de la soutenir. Jamais la rupture n'a été aussi profonde entre le sommet des syndicats et la masse des syndicalistes du quotidien.
Alors, les syndicats bureaucratiques sauront-ils dépasser la défense des acquis sociaux pour embrayer sur la conquête de nouveaux droits et proposer de sortir du système économique actuel ?
Médias verrouillés par le politiquement correct, Gilets Jaunes sévèrement réprimés pendant les manifestations, la France serait-elle en train de sombrer dans une douce dictature qui ne dit pas son nom ?
Ce sont les questions sur lesquelles les participants du colloque annuel du Cercle Aristote interviennent : Pierre-Yves Rougeyron, directeur de la publication de la revue Perspectives Libres, Fabrice Grimal, essayiste et chef d'entreprise, Josepha Laroche, universitaire, Marek Gladysz, journaliste polonais, Didier Maïsto, patron de Sud Radio, Maître David Libeskind, cofondateur du collectif Robes noires et gilets jaunes, et Faouzi Lellouch, organisateur de plusieurs actions des Gilets Jaunes, sont au rendez-vous.
"La grande erreur… est de se représenter la révolution comme quelque chose qui se fait du jour au lendemain. En fait, la révolution est un processus d'évolution des masses s'étalant sur plusieurs années dans des circonstances faisant effet d’accélérateur." Engels à Bernstein, 27 août 1883
Cet échange entre Francis Cousin et une Gilet Jaune Constituante nous permet de mesurer l'état de la lutte des classes en France, radicalement ré-actualisée depuis le début de l'insurrection des Gilets Jaunes.
Le grand embrasement du prolétariat est-il pour demain ? La communauté de l'être est-elle en passe d'advenir ?
La révolte des Gilets jaunes a pris de court le pouvoir en place et l'écrasante majorité des intellectuels, qui n'ont rien vu venir.
Plus d'une demi-année après le soulèvement initial, quelle est l'état de ce mouvement social ? Quelles ont été ses victoires et ses défaites ? Comment doit-il évoluer afin d'éviter les pièges qui lui sont tendus ?
Autant de questions auquelles le politologue Youssef Hindi répond, en nous rappelant au temps long de l'histoire, des révoltes et des révolutions.
Comment tout a basculé ? Qu'est-ce qui a fait qu'en quelques mois, le couvercle d'une marmite qui bouillait depuis quarante ans a sauté ? Qu'une élite se retrouva fort dépourvue quand la bise jaune fut venue ? Le tsunami n'est évidemment pas que français : Europe de l'Est, Russie, États-Unis trumpistes, Bolsonaro au Brésil, Salvini en Italie, sans oublier le Brexit, tout montre que les peuples se sont mis en mouvement. Ce n'est pas seulement le pouvoir d'achat ou le prix du carburant, mais aussi la dignité, l'identité et, pour tous ces peuples que l'on avait rangés au magasin des accessoires, retrouver leur appartenance, leur honneur et leur dimension d'êtres humains.
André Bercoff retrace les raisons de la colère : capitalisme de connivence, noblesse financiaro-administrative, clergé politico-médiatique et un tiers État fragmenté, divisé, caillassé, mais qui se recompose dans les tréfonds d'une France accablée par l'impôt et qui rejette ses dirigeants politiques.
Avec vigueur et humeur, il explique pourquoi ce peuple qu'on croyait complètement dissous dans l'alcool de la mondialisation refait surface dans tous les domaines, et avec une radicalité inconnue jusqu'alors.
L'analyste politique et prospectiviste Michel Drac répond aux questions et aux demandes de précison d'Alban Dousset, fin lecteur et auditeur attentif.
Sommaire :
- 0'00'00 : qu'avez-vous pensé de ma réponse à votre vidéo ?
- 0'07'07 : comment articulez-vous la nécessité de vulgarisation et la nécessité de rigueur méthodique ? Où en êtes-vous de votre idée de développer un processus de gestion/validation collective des idées ?
- 0'14'59 : vous dites que "le matérialisme bourgeois n'a rien à proposer au-delà du narcissisme" (p183 dans Essais). Pourtant, dans Triangulation, vous décrivez de nombreux courants spirituels gravitant autour du mondialisme et du matérialisme bourgeois. Doit-on voir dans ce constat une évolution de votre part ?
- 0'21:30 : dans La question raciale, vous opposez aux "racialistes extrémistes", des "antiracialistes extrémistes", en prenant comme exemple le massacre des peaux rouges, le génocide rwandais ou l'épuration des paysans ukrainiens. On pourrait quand même procéder à une objection : ces massacres socio-ethniques, n'ont pas comme fondement principal et explicite, la motivation raciale ou humaniste.
- 0'30'12 : dans La question raciale, vous déclarez (p327 dans Essais) : "le comportement suicidaire que nous observons chez nombre de nos contemporains européens traduit de leur part une volonté inconsciente de mourir à cette "paléo-humanité" prétechnologique pour que naisse en eux une "néo-humanité" adaptée à l'ère nouvelle." Ne s'agit-il que de cela ? Le recul de la démographie n'a-t-il pas d'autres explications ?
- 0'32'22 : dans une courte vidéo qui circule sur YouTube, Pierre Hillard résume votre point de vue spirituel qui serait, selon lui, "du côté de la loi", tandis que lui serait du côté de "l'amour". En référence à une conversation (entre lui et vous) dans laquelle vous auriez déclaré "dans l'Ancien Testament, il y a la loi, dans le Nouveau Testament, il y a l'amour, et moi je suis resté fidèle à la loi". Quelle est votre réaction à ce sujet ?
- 0'36'28 : les contours de la notion de satanisme sont finalement assez variables selon les individus et les religions. Bien que vous soyez chrétien, vous intégrez à votre grille de lecture morale la notion de volonté de puissance chère à Nietzsche. Pourriez-vous esquisser, une définition complète et personnelle de ce que recouvre selon vous la notion de satanisme ?
- 0'43'00 : au sujet du RIC, vous semblez penser que le peuple manque de maturité pour exploiter un tel outil. Sans faire du RIC un moyen "réel" pour le peuple de s'autogouverner, ne peut-on pas voir ce dispositif comme un moyen pour le peuple de réaliser la "démopédie" que vous appelez de vos vœux ?
- 0'54'36 : quels sont, selon vous, les facteurs de toutes natures, structurants, favorisant tel ou tel système politique ?
- 0'56'58 : la vision que vous donnez des communautés primitives, héritée de Pierre Clastre, fait la part belle aux violences et aux inégalités. Avez-vous consulté les travaux d'Emmanuel Todd relatifs aux familles nucléaires "primordiales" ou les descriptions des démocraties primitives (pouvoir politique presque totalement décentralisé) évoquées par Pierre Clastre lui-même ?
- 1'00'13 : avez-vous lu la critique de François Héran de la thèse de Stephen Smith de La ruée vers l'Europe dont il a fait une note de lecture ? Si oui, qu'en pensez-vous ?
- 1'06'17 : dans votre vidéo consacrée à Zbigniew Brzezinski, vous formulez l'idée que la géopolitique globale serait une perspective surdéterminante. Plus loin, vous reconnaissez une forme de "soumission au dollar" du stratège géopolitique. La perspective surdéterminante ne serait-elle pas la jonction/articulation entre les monnaies et la géopolitique (plutôt que la "seule" géopolitique) puisqu'elle détermine nettement les autres choix géopolitiques/stratégiques ?
- 1'07'05 : dans La ponérologie politique, vous évoquez des aspects réversibles et non réversibles propres à l'idéologie dominante. De manière très intéressante, vous énumérez certains aspects réversibles. Seriez-vous capable de mentionner les aspects les moins réversibles, les plus structurants, de l'idéologie dominante ?
- 1'08'42 : si votre objectif est l'acquisition et la diffusion de connaissances, comment pourriez-vous mobiliser de manière efficace la ressource que constitue l'intérêt de votre public ?
Comment En Marche a capté l'électorat du bloc bourgeois ? Quelle stratégie opposer face à ce bloc, entre populisme, souverainisme, ou plutôt retour à une union de la gauche, façon programme commun ? Les gilets jaunes sont-ils l'expression de l'anti bloc bourgeois qui pourrait naître de la recomposition politique en cours ?
Pour tenter de répondre à ces questions, Théophile Kouamouo reçoit Bruno Amable, co-auteur avec Stefano Palombarini de L'illusion du bloc bourgeois.