L'extraordinaire défiance de couches de population toujours plus larges envers les "partis de gouvernement" et la classe politique en général, au profit de mouvements d'un type nouveau, qu'on appelle "populistes", est sans nul doute le fait le plus marquant des transformations du paysage politique intervenues depuis au moins deux décennies.
Partout se confirme l'ampleur du fossé séparant le peuple de la Nouvelle Classe dominante. Partout émergent de nouveaux clivages qui rendent obsolète le vieux clivage droite-gauche. Mais que faut-il exactement entendre par "populisme" ? S'agit-il d'un simple symptôme d'une crise générale de la représentation ? D'une idéologie ? D'un style ? Ou bien le populisme traduit-il une demande fondamentalement démocratique face à des élites accusées de ne plus faire de politique et de vouloir gouverner sans le peuple ?
L'actualité la plus immédiate sert ici à situer les enjeux politiques, sociologiques et philosophiques du débat.
Émeutes de 2023, radicalisation du débat, partis politiques qui soufflent sur les braises, la paix civile est-elle en sursis dans les démocraties occidentales, ainsi que des fictions comme La Fièvre, série Canal + signée Éric Benzekri, ou Civil War d'Alex Garland, côté États-Unis, le suggèrent ?
François Bégaudeau, écrivain, et Pierre-Yves Rougeyron, président du Cercle Aristote, débattent de ces questions.
Un débat mené par Aude Lancelin.
Philosophe sans système à l'influence protéiforme, Nietzsche a souvent été accusé d'avoir vu sa pensée être utilisée par les allemands pour nourrir leur impérialisme. On sait moins qu'il fut reçu et commenté dans le corpus du nationalisme français tant chez les élèves de Maurras et de Barrès que chez les renégats comme Drieu la Rochelle.
Pas ses travaux, Julien Dupré comble un vide historiographique et ouvre la voie à de nouvelles recherches pour comprendre le nationalisme français.
Comment fixe-t-on son choix électoral dans cet archipel qu'est devenue la France ? Le clivage droite-gauche est-il toujours pertinent quand toute une division semble se dessiner autour des gagnants et des perdants de la mondialisation ? À quel point la vague bleu Marine est-elle en train de déferler sur la France ? Quelles sont les raisons qui semblent porter cette "droitisation" du pays ?
Jérôme Fourquet a collecté toutes les données statistiques, et propose en chiffres et en cartes un tableau politique édifiant, pour comprendre et anticiper les bouleversements à l'œuvre en France : du rôle majeur des conditions économiques et sociales, à l'influence de l'insécurité et de l'immigration, tout passe sous le radar d'une étude qui se veut la plus exhaustive et objective possible.
Un entretien mené par Olivier Berruyer.
Pour penser, nous avons besoin de catégories tout comme pour parler nous avons besoin de noms, de verbes, d'adjectifs et d'autres termes grammaticaux. Et pour penser la politique, nous avons besoin de catégories politiques. Encore faut-il qu'elles soient utiles, c'est-à-dire qu'elles aident à clarifier nos propos.
Or, à l'évidence, ce n'est plus avec les mots "droite" et "gauche" que nous pouvons rendre compte de la mutation radicale qu'a connue le champ politique ces deux dernières décennies.
Décryptant les programmes et la sociologie mais aussi les jeux de pouvoir, les réseaux et les affaires, David L'Epée, politologue suisse, nous montre où se trouvent aujourd'hui les lignes de fractures qui structurent le politique.
Pour penser, nous avons besoin de catégories tout comme pour parler nous avons besoin de noms, de verbes, d'adjectifs et d'autres termes grammaticaux. Et pour penser la politique, nous avons besoin de catégories politiques. Encore faut-il qu'elles soient utiles, c'est-à-dire qu'elles aident à clarifier nos propos.
Or, à l'évidence, ce n'est plus avec les mots "droite" et "gauche" que nous pouvons rendre compte de la mutation radicale qu'a connue le champ politique ces deux dernières décennies.
Décryptant les programmes et la sociologie mais aussi les jeux de pouvoir, les réseaux et les affaires, Denis Collin nous montre où se trouvent aujourd'hui les lignes de fractures qui structurent le politique.
"Je préfère une analyse juste d'Alain de Benoist à une analyse injuste de Minc, Attali ou BHL" avait déclaré Michel Onfray en 2015. Mais qui est vraiment Alain de Benoist ?
Philosophe, penseur de la Nouvelle Droite, Alain de Benoist a écrit plus d'une centaine d'essais sur la métapolitique et l'histoire des idées. Son dernier ouvrage s'intitule L'Exil intérieur, carnets intimes paru récemment chez Krisis Editions. Un essai qui témoigne de la forte évolution intellectuelle et politique d'un jeune militant d'extrême-droite dans les années 60 passsé au populisme actuel, invoquant ainsi Proudhon et Orwell.
Le regain d'intérêt, en France ces dernières années, pour les écrivains très marqués à droite ou d'extrême-droite, à commencer par Maurras, est sans doute à rapprocher de l'immense succès de Michel Houellebecq, dont les romans déplorent un déclin des grandes autorités socio-culturelles du passé qui laisserait l'homme contemporain en mal de repères, livré sans remède à la dépression en contrepartie d'une liberté illusoire. Mais existe-t-il, au plan du style littéraire, une caractéristique commune et spécifique aux auteurs classables dans la catégorie "réactionnaires" ?
C'est la question sur laquelle se penche Vincent Berthelier dans un livre récemment paru aux éditions Amsterdam. Il y revient sur les liens entre classicisme et même purisme stylistique, ou au contraire inventivité des forme littéraires, d'un côté, et conservatisme ou fascisme. Le cas Renaud Camus, par exemple, paraît confirmer le lien entre passéismes stylistique et politique fixé par le modèle de Maurras, puisque Camus abandonne l'inventivité littéraire qui avait jusque caractérisé son oeuvre au moment où il s'engage dans son combat d'extrême droite. Le seul cas où la radicalité politique réactionnaire et la radicalité stylistique vont vraiment de pair est sans doute celui de Louis-Ferdinand Céline. Ce qui n'empêche pas Vincent Berthelier de proposer une très stimulante plongée dans l'histoire stylistique et politique de la littérature des XXe et XXIe siècle, où l'on croise entre autres Georges Bernanos, Marcel Jouhandeau, Marcel Aymé ou encore Cioran et Richard Millet.
Émission "On s'autorise à penser", animée par Julien Théry.