Alors que le gouvernement suisse a déclaré la situation sanitaire actuelle comme "extraordinaire" au sens de la loi sur les épidémies, il s'est accordé les pleins pouvoirs dans la gestion de la pandémie de Covid-19. Dans ce contexte d'exception, comment peut-on encore défendre la démocratie ? Et d'ailleurs, a-t-elle encore quelque chose à dire ?
Auteur de travaux sur la question de la temporalité démocratique et sur la démocratie direct, Antoine Chollet est chercheur et professeur de sciences politiques. Il travaille notamment sur les théories de la démocratie, sur la pensée politique contemporaine ainsi que sur le nationalisme, en particulier dans sa variante suisse.
Les années passent et le bouleversement des paysages électoraux continue, sans parler de l'éclosion de mouvement sociaux comme les Gilets Jaunes. Les populistes sont de plus en plus nombreux dans la contestation et proches du pouvoir dans de nombreux pays d'Europe.
Comment comprendre cette vague de fond politique qui déferle sur nos vieux pays sous-industrialisés ? La grille de lecture économiciste est-elle suffisante ? Faut-il intégrer la variable de l'insécurité culturelle ? Et comment les partis politiques s'adaptent-ils à cette nouvelle donne ?
Pourquoi s'abandonner au conflit et à la culture du pluralisme lorsque tant de régimes autoritaires semblent démontrer leur efficacité ? L’argument selon lequel les démocraties sont faibles par nature justifie tous les abandons en matière de droit.
Un détour par l'année 1938 en France permet d'éclairer un problème bien actuel : les démocraties ne deviennent-elles pas faibles lorsqu'elles sont affaiblies par ceux qui sont censés les défendre ? Sur fond d'abandon du Front populaire et de concessions aux régimes fascistes, 1938 est une année de défaites sociales, politiques et morales qui résonnent étrangement avec notre présent.
Une rencontre organisée en partenariat avec la Fondation Calouste Gulbenkian et animée par Miguel Magalhães et Anne-Lorraine Bujon.
Comment expliquer l'insolente victoire des forces pourtant responsables de la crise économique de 2008, l'une des pires depuis 1929 ? Comment expliquer que, en dépit du chaos qu'il a généré et des désastres qu'il continue de préparer, le néolibéralisme soit sorti renforcé de la crise ? Au moment de son déclenchement, nombre d'économistes parmi les plus célèbres avaient hâtivement annoncé sa "mort". Ils n'ont vu dans la poursuite des politiques néolibérales que le résultat d'un entêtement doctrinal.
Pour Pierre Dardot et Christian Laval, le néolibéralisme n'est pas qu'un simple dogme ou une théorie qui aurait "failli" : c'est un mode de gouvernement des sociétés, en train de réaliser la sortie de la démocratie. Soutenu par des oligarchies puissantes, il est un véritable système politico-institutionnel obéissant à une logique d'autorenforcement. Loin d'être une rupture, la crise est devenue un mode de gouvernement d'une redoutable efficacité.
En montrant comment ce système s'est cristallisé et solidifié, ils expliquent que le verrouillage néolibéral a réussi à entraver toute correction de trajectoire par la désactivation progressive de la démocratie. Accroissant le désarroi et la démobilisation, la gauche dite "gouvernementale" a contribué très activement au renforcement de la logique oligarchique. Ceci peut conduire à la sortie définitive de la démocratie au profit d'une gouvernance expertocratique soustraite à tout contrôle.
Pourtant, rien n'est encore joué. Le réveil de l'activité démocratique, que l'on voit se dessiner dans les mouvements et expérimentations politiques des dernières années, est le signe que l'affrontement politique avec le système néolibéral et le bloc oligarchique a déjà commencé.
Une conférence animée par Stanislas d'Ornano.
La République de Weimar a vu le jour dans des circonstances difficiles. Après une période de stabilisation où l'Allemagne retrouve une certaine prospérité, une crise mondiale l'atteint de plein fouet et entraîne la chute d'une république encore trop fragile.
Dans quelle mesure l'histoire de Weimar présente-t-elle des symptômes susceptibles de nous éclairer sur la crise actuelle de nos démocraties ?
Quatre livres de ou sur Carl schmitt on été récemment traduit en français : La loi désarmée. Carl Schmitt et la controverse légalité/légitimité sous Weimar (Augustin Simard, Éditions de la MSH, 2009), Légalité et légitimité (Carl Schmitt, traduit par Christian Roy&Augustin Simard, Éditions de la MSH, 2016), Loi et jugement. Une enquête sur le problème de la pratique du droit (Carl Schmitt, traduit de l'allemand et présenté par Rainer Maria Kiesow, Éditions de l’EHESS, 2019) et Carl Schmitt. Nomos, droit et conflit dans les relations internationales (Ninon Grangé, PUR, 2013).
C'est donc à une rencontre sur l'histoire politique des concepts du droit (légalité/légitimité, loi/jugement, etc.) (re)pensés par Carl Schmitt et étroitement liés au constitutionnalisme que nous avons droit, en compagnie des auteurs et traducteurs des livre pré-cités, qui s'avèrent être également parmi les meilleurs spécialistes au plan international de l'œuvre du plus grand juriste allemand du XXe siècle.
Intellectuel suisse, collaborateur régulier des revues Éléments et Rébellion et rédacteur en chef de la revue Krisis, David L'Epée nous livre quelques réflexions sur les rapports qui existent entre pessimisme politique, déclinisme, misanthropie et anti-démocratie.
Prenant parti pour l'option inverse – celle de la confiance dans le peuple, de la démarche humaniste et la démocratie directe – David L'Épée a exposé les raisons pour lesquelles ce sentiment de désespérance, illusoire, faisait le jeu du pouvoir que nous contestons et était souvent le fruit d'un jugement erroné sur la situation.
Loin de céder à un idéalisme naïf, il s'agit de renouer avec une appréhension tragique de l'histoire, pleine de promesses et de possibilités, et de méditer sur la célèbre formule de Gramsci : le pessimisme de l'intelligence et l'optimisme de la volonté.
Avant d'être un habitué du plateau de RT France et du studio de Sud Radio, Philippe Pascot était un professionnel de la politique. En 2014, l'homme au chapeau claque la porte du monde politique. Il publiera dans la foulée de nombreux livres traitant de la corruption et des conflits d'intérêts chez les élus et dans les hautes sphères de l’État.
Très populaire parmi les Gilets jaunes, Philippe Pascot nous livre ici son état des lieux de la situation politique française.
Émission "Eurêka", animée par Vincent Lapierre.