Bernard Charbonneau (1910-1996) a eu dès sa jeunesse la conviction que son siècle serait en même temps et pour les mêmes raisons celui du totalitarisme et du saccage de la nature. Pas de liberté sans puissance d'agir ; mais dans un monde fini le développement indéfini de la puissance matérielle et de l'organisation sociale risque d'anéantir la liberté de l’homme. A partir des années trente et jusqu'à sa mort, Charbonneau a réfléchi sur les dangers qui résultent, pour la nature et pour la liberté de ce qu'il appelait la Grande mue, c'est-à-dire de la montée en puissance de plus en plus rapide du progrès technique, scientifique et industriel. Mais on se fourvoierait en réduisant l'œuvre de Charbonneau à une réflexion sur l'écologie politique.
Il ne s'est pas intéressé seulement à la question écologique ; son œuvre nous propose une analyse plus vaste des coûts de la modernisation et des contradictions du monde moderne. Pendant longtemps cette préoccupation a fait de lui un marginal dans le monde intellectuel. Cependant, Charbonneau voyait juste lorsqu'il annonçait la crise écologique, l'aggravation de la bureaucratisation de l'existence et la technocratisation de la vie sociale. Plus le temps passe et plus son œuvre s'avère pertinente et actuelle.
Le philosophe et universitaire Eric Martin nous propose, dans cette série d'interventions, de (re)découvrir des auteurs de la théorie critique, de la pensée québécoise ou de la tradition philosophique.
Le point commun entre toutes les pensées exposées étant de récuser la conception de la liberté supposément "auto-fondée", c'est-à-dire indépendante de quelque condition que ce soit. La liberté, en effet, a des "racines", c'est à dire qu'elle suppose des conditions qui la rendent possible et dont il importe de se montrer soucieux si l'on veut qu'elle conserve un sens et une réelle effectivité.
La philosophie est-elle une vocation ? Comment viennent les idées ? Comment se fabrique un concept ? À quoi ressemble l'atelier du philosophe ? Et quel rôle doit-il jouer dans la cité ?
Portrait du philosophe Michaël Foessel, marqué par la rencontre avec l'écriture de Paul Ricoeur où il découvre la nuance et pour qui philosopher sert à maîtriser l'aspect immaîtrisable de la vie, reprendre la main.
La philosophie, une expérience de la liberté de penser.
Émission "Les Chemins de la philosophie", animée par Adèle Van Reeth.
Lié de nombreuses années avec le grand écrivain allemand Ernst Jünger (1895-1998), Alain de Benoist passe ici au crible près d'un siècle de création littéraire (journaux, souvenirs, essais, romans) habitée par un cheminement de poète tout à la fois libre et fidèle à une double aspiration vers la nature et l'âme, le réel et le sacré.
Anti-individualiste, théoricien de la révolution conservatrice revenu de sa mystique de la guerre et de sa foi en une industrie prométhéenne, la pensée de Jünger transparaît dans toute son acuité et actualité d'écosystème affranchi de la loi de l'argent et du désenchantement matérialiste.
Tout cela à travers le remarquable décryptage systématique effectué par Alain de Benoist des figures du Soldat du front, du Travailleur, du Rebelle, et de l'Anarque, invitation à un voyage à travers l'univers symbolique et enraciné de celui dont François Mitterrand dit qu'il fut "l'un des plus grands Européens du XXe siècle".
Émission du "Libre Journal des amitiés françaises", animée par Thierry Delcourt.
Au crépuscule du XXe siècle a coïncidé celui de la superpuissance soviétique. Entre fossoyeurs et réanimateurs s'est engagée la bataille pour le patient russe.
Retour sur les protagonistes de l'époque en suivant le destin de Vladimir Poutine, futur vainqueur en pays vaincu.
- 0'00'00 : Leur figure
- 0'01'36 : A la veille de l'effondrement
- 0'08'29 : De l'intention de Gorbatchev
- 0'09'21 : Humiliés et offensés
- 0'18'14 : Des mesures en temps de crise
- 0'30'55 : Les âmes mortes
- 0'31'58 : Qu'est-ce que "La Famille" ?
- 0'43'38 : La Guerre et la Paix
- 0'53'19 : Les pieds dans la glaise
- 0'56'14 : La clé de voûte du Caucase
- 1'02'03 : De l'inconvénient d'être séparé
- 1'03'38 : Bataille pour le Heartland
- 1'08'06 : D'Athènes et de Sparte
- 1'10'13 : Le synégore devant l'Assemblée du peuple
- 1'15'18 : La Roche Tarpéienne et le Capitole
- 1'19'42 : De l'Esprit des Lois
- 1'24'09 : La musique d'une vie
- 1'30'48 : La littérature pour horizon
- 1'34'47 : Leurs jeunes années
- 1'37'22 : Si la France m'était contée
Chercheur génial, écologiste radical au début des années 1970, ermite retiré du monde pendant 23 ans, il a eu trois ou quatre vies successives entre sa naissance, le 28 mars 1928 à Berlin, et sa mort, en 2014, quelque part dans l'Ariège. Le monde des mathématiques l'a découvert en 1958, au congrès mondial d'Edimbourg, où il présenta une refondation de la géométrie algébrique. La géométrie algébrique, ce sera sa grande œuvre, une sorte de cathédrale conceptuelle construite en collaboration avec deux autres mathématiciens, Jean Dieudonné et Jean-Pierre Serre. De 1950 à 1966, il fit des mathématiques, seulement des mathématiques.
Mais un jour, il finit par découvrir la politique. En 1966, il refusa d'aller chercher sa médaille Fields à Moscou, où deux intellectuels venaient d'être condamnés à plusieurs années de camp pour avoir publié des textes en Occident sans autorisation. L'année suivante, il passa trois semaines au Vietnam pour protester contre la guerre lancée par les Etats-Unis. À partir de 1971, il consacra l'essentiel de son temps à l'écologie radicale à travers un groupe qui avait été fondé par un autre mathématicien, le groupe "Survivre et vivre". En août 1991, il choisit de disparaître dans un village tenu secret après avoir confié 20'000 pages de notes à l'un de ses anciens élèves.
Le nom d’Alexandre Grothendieck sonne un peu comme la promotion de l'évanescence dans l'ontologie radicale. Car sa disparition donne à croire qu'elle le résume et le raconte davantage que tout le reste. Le choix qu'il a fait de s'évader rétro-projette son ombre sur tous les événements antérieurs de sa vie. Comme s'il n’avait jamais eu d'autre intention que celle d'échapper un jour au commerce des hommes. Mais raisonner ainsi serait injuste, car ce serait oublier l'homme, ses vies et son œuvre, qui est monumentale et demeure en partie inexplorée.
Émission "La Conversation scientifique", animée par Etienne Klein.
L'oeuvre de l'historien Jean Delumeau (1923-2020) a une place de choix dans l'historiographie récente. C'est en compagnie de la professeure d'histoire moderne Isabelle Poutrin et du professeur d'histoire contemporaine Guillaume Cuchet que nous revenons sur le parcours, les productions et l'héritage de ce grand historien catholique français, spécialiste des mentalités religieuses en Occident, et plus particulièrement du christianisme.
- 00'00 : Introduction
- 01'00 : La place majeure tenue par Jean Delumeau dans l'historiographie
- 04'00 : Un parcours universitaire qui conduit à Rome et à l'histoire moderne
- 06'00 : À l’origine, loi du religieux, un historien de l’économie et de la société, sur les lancées de Fernand Braudel
- 08'00 : Extrait : Jean Delumeau et l’alun de Rome
- 11'30 : Un historien des grands mouvements et de la longue durée
- 13'00 : Extrait : le choix d'écrire un volume de la Nouvelle Clio sur la Réforme
- 15'00 : Un historien soucieux d'œcuménisme
- 16'00 : Jean Delumeau participant de la construction d'une légitimité de l'histoire religieuse, longtemps marginale ou cléricale
- 18'00 : Un historien des "mentalités"
- 21'00 : Un talent du texte et de la citation
- 25'00 : Comment articuler l'histoire des croyances, et celles des pratiques sociales ?
- 27'30 : Une carrière singulière, au Collège de France, avec des enquêtes collectives
- 28'30 : Extrait : la peur en occident (introduction de la 2e partie)
- 31'00 : Un historien de la peur, mais pas seulement, en lien dialectique avec une dimension rassurante de l'Église et du paradis
- 33'00 : Des prolongements aux idées de Delumeau, sur le "contexte panique" du XVIe siècle, chez Denis Crouzet ou Caroline Callard
- 34'00 : Jean Delumeau, essayiste catholique, aux prises avec la "déchristianisation"
- 37'00 : Les liens entre passé et présent dans son œuvre, et la question du degré de christianisation du Moyen âge
- 39'00 : Les critiques adressées par Jean Delumeau à l'Église et à son rigorisme
- 42'00 : Une (légère) ouverture à l'histoire des femmes
- 44'00 : Un livre collectif questionnant L'historien et la foi (1996)
- 45'15 : Quelle postérité ?
- 48'00 : Par quel livre commencer ?
Explorateur célèbre, génie méconnu, Alexandre de Humbolt fut un savant universel que l'on réduit souvent au voyageur, à l'homme qui a arpenté pendant plus de cinq ans les colonies espagnoles d'Amérique, à la découverte du Nouveau Monde.
D'origine franco-prussienne, il partagea sa vie entre la France et l'Allemagne, et fréquenta les plus grands scientifiques de son époque. En érudit boulimique et encyclopédique, il fut un savant intuituf-romantique-visionnaire, qui voulut tout englober dans son approche de la physique du monde ; un précurseur de nombreuses sciences, telles l'écologie, la climatologie, la géographie moderne, l'océanograghie, l'ethnologie, l'anthropologie et l'archéologie américanistes, tout en faisant avancer d'autres disciplines comme la cartographie, la physique, le magnétisme ou encore la volcanologie. Il ambitionna d'inventorier la nature tout en cherchant à en comprendre le sens !
La paléoichtyologue Mireille Gayet l'historienne de l'environnement Valérie Chansigaud nous font revivre ce personnage hors-norme.
Émission "La Marche des sciences", animée par Aurélie Luneau.