La question de la production de valeur en régime capitaliste est l'un des enjeux de base du maintien ou de la conquête du pouvoir.
Les différentes écoles de pensée se réclamant (au moins en partie) de Karl Marx continuent aujourd'hui de s'opposer sur cette question fondamentale. En effet, suivant la manière dont les concepts de valeur d'usage et d'échange ou des côtés concret et abstrait du travail sont compris, le combat politique ne sera pas le même.
Dans une déclinaison qui diffère sensiblement des approches développées par la Wertkritik, le marxisme orthodoxe ou les institutionnalistes, Jean-Marie Harribey et Bernard Friot s'attachent à retravailler ces concepts pour leur rendre leur potentiel d'émancipation.
Le débat est animé par Guillaume Fondu.
Un peu plus d'un mois après les attentats de Paris et les grandes marches du 11 janvier qui, au nom de la liberté d’expression et de la laïcité, ont déchaîné l’islamophobie et justifié de nouvelles atteintes à nos libertés publiques, il est bon de nous interroger sur les croyances que nous inculque la religion capitaliste et dont la messe nous est dite chaque matin par les prêtres médiatiques sans que nous ne revendiquions sa séparation d'avec l'Etat : la foi capitaliste, son culte et ses rites pour les deux grandes divinités que sont le marché du travail et celui des capitaux.
Un combat à mener d'urgence afin que le peuple recouvre sa pleine souveraineté en rejetant les croyance qui le maintiennent dans la sujétion
Frédéric Lordon et Bernard Friot partagent l'ambition de créer une théorie politique et économique d'émancipation et de progrès social.
Leur échange permet d'étudier en profondeur la proposition du salaire à vie, défendu depuis de longues années par Bernard Friot comme un outil de dépassement du capitalisme, trouvant ses racines dans un certain nombre de pratiques déjà existantes qui doivent être radicalisées et généralisées.
L'émancipation passera forcément par la reconquête de la souveraineté populaire !
Bernard Friot analyse les enjeux liés à la réforme des retraites françaises et revient sur l’historique de leur réforme depuis 1987.
De son point de vue, la retraite par cotisation et répartition constitue une des plus belles conquêtes du mouvement ouvrier. En effet, on peut considérer les retraites comme un salaire continué qui permet aux personnes qui les reçoivent d'être libérées de l'institution capitaliste du marché du travail.
Bernard Friot propose de porter plus loin les institutions qui sont nées des luttes pour le salaire, et dont nous faisons à grande échelle l'expérience de l'efficacité : la qualification personnelle et la cotisation. La qualification personnelle peut faire disparaître le marché du travail, à condition d'attribuer à chacun, à sa majorité, une qualification et donc un salaire. Et contre les projets de remplacer la cotisation sociale par la CSG, la TVA ou les mutuelles, il faut au contraire l'étendre en créant une cotisation économique pour un financement de l'investissement sans crédit et donc sans dette. L'enjeu du salaire, c'est la disparition du marché du travail, et donc du chantage à l'emploi, ainsi que la suppression du crédit lucratif, et donc du chantage à la dette. Ce n'est ni d'une réforme fiscale ni d'une plus grande régulation étatique que nous avons besoin, mais de plus de pouvoir populaire sur l'économie et sur le travail.
Jean-Marie Harribey présente son important travail de réévaluation de la théorie de la valeur, et critique les illusions écologisantes (et néo-classiques) de mesure économétrique de la nature.
Il réactualise ainsi la théorie marxiste de la valeur économique, qui paraît plus actuelle (et empiriquement vérifiée) que jamais.
La présentation de Jean-Marie Harribey est suivie d'un débat avec Bernard Friot et Dominique Pagani.