Pourquoi certains penseurs, et non des moindres (de Hölderlin à Stirner en passant par Hegel, Feuerbach et Marx), ont-ils ressenti le besoin de théoriser ce sentiment de dépossession propre à notre époque moderne ?
C'est le but de l'étude passionante du concept d'aliénation à laquelle nous sommes conviés en compagnie de Bruce Bégout.
Marcel Gauchet, au travers d'une enquête patiente et minutieuse, examine le processus de dissolution et de retournement de l'emprise organisatrice du religieux : c'est donc une histoire politique de la religion qu'il conduit.
À rebours de l'analyse marxiste qui définit la religion comme une superstructure déterminée par l'organisation économique et sociale, Gauchet s'intéresse à l'action du religieux sur la réalité elle-même. C'est ainsi qu'il parvient à dégager la spécificité révolutionnaire du christianisme et son rôle décisif dans le développement occidental.
Bien plus, si nos sociétés se laïcisent, les valeurs laïques elles-mêmes ne seraient que la transposition des valeurs religieuses traditionnelles. Il y aurait donc du religieux après la religion, et le christianisme serait même la religion de la sortie de la religion.
C'est au travers des expériences des uns et des autres et de leur rapport à Ivan Illich que nous mesurons le travail de l'oeuvre du philosophe autrichien.
Universitaire ou acteur associatif, du monde économique ou de la politique, c'est toute une génération qui a été influencée par Ivan Illich et ses thèses radicales.
Une invitation à (re)découvrir la postérité et la portée de sa pensée.
La table ronde est organisée dans le cadre du colloque "Vivre et penser avec Ivan Illich. Dix ans après."
L’œuvre de Cornelius Castoriadis offre au lecteur l’aspect d’un vaste chantier de réflexion où sont sans cesse retravaillés les mêmes matériaux. Cette pensée ne présente pas au premier abord une forme unitaire, mais offre au contraire un aspect hétérogène : l’extrême diversité des problèmes sur lesquels a réfléchi Castoriadis -le vivant, le psychisme, la société, l’histoire, la création, la politique- ainsi que l’extrême diversité de ses références peuvent dérouter.
Un retour sur son parcours personnel permet de mieux comprendre la genèse et l'unité de cette pensée foisonnante, centrée sur ce que l'on pourrait appeler l' "imaginaire radical".
Le management se présente volontiers comme une simple activité visant à améliorer l'efficacité, la productivité et la qualité dans la production de biens et de services, mettant en oeuvre des outils et des techniques qui se veulent de simples instruments.
L'examen des discours et des outils managériaux montre, s'il en était besoin, que le management va bien au-delà de la dimension pragmatique et fonctionnelle dont il se réclame : il dresse un tableau chaotique des évolutions du monde dans tous les domaines, développe une conception de l'homme nouveau adapté à ces évolutions, et véhicule la représentation d'un pouvoir qui effacerait les liens de subordinations pour laisser la place à un collectif horizontal tout entier organisé en réseau.
Ces représentations ne concernent pas seulement l'entreprise, mais elles sont symptomatiques de la décomposition d'un imaginaire qui s'est développé avec l'industrie et qui est aujourd'hui en crise. L'inflation du discours managérial, de ses thèmes et de ses outils, dans l'ensemble des sphères de l'activité sociale accompagne une modernisation qui "tourne à vide" et cède aux pressions de l'idéologie libérale.
Le "malaise dans la société" est moins un point de départ de l’analyse sociologique qu’un problème à élaborer et à clarifier.
Alain Erhenberg propose de remplacer l’idée individualiste que la société cause des souffrances psychiques par l’idée sociologique que la souffrance psychique est aujourd’hui une forme d’expression obligatoire, c’est-àdire attendue, du mal social.
Cela le conduit à l’hypothèse qu’avec la santé mentale, on assiste à une généralisation de l’usage d’idiomes personnels pour donner forme et résoudre des conflits de relations sociales. Ces jeux de langage consistent à mettre en relation malheur personnel et relations sociales perturbées à l’aune de la souffrance psychique, unissant ainsi le mal individuel et le mal commun.
À partir de là, le conférencier développe l’hypothèse que, brouillée dans le malaise, se joue une crise de l’égalité à la française, c’est-à-dire d’une égalité conçue essentiellement dans les termes de la protection, et une protection en termes de statut, sur le modèle de la fonction publique, alors que l’égalité d’aujourd’hui, et donc la lutte contre les inégalités sociales, se joue dans les termes de la capacité.